Présenté par Jean-Loup Ballay
Film français (1969, 2h20) de Jean-Pierre Melville avec Lino Ventura, Simone Signoret, Paul Crauchet, Jean-Pierre Cassel, Nathalie Delon, Paul Meurisse et Serge Reggiani
Peu de monde pour ce film Ciné-Culte déjà bien diffusé à la télévision et connu du public. Comme le remarque Claude, c’est tout autre chose de le voir au cinéma. C’est pour ma part la quatrième fois que je vois ce film, je ne me rappelais même pas qu’il était en couleur. Jean-Loup assure qu’on est mieux placé pour apprécier ce film lorsqu’on l’a vu à sa sortie en 1969. Sans connaître ses raisons, j’ai tendance à l’approuver, en 1969, nombre spectateurs dans les salles de cinéma avaient connu la guerre. Le spectateur de 2016 est un autre, il n’a plus la même préparation pour recevoir ce film. Nous n’avons plus le même imaginaire collectif.
Or, voici un film sur la résistance qui ne montre rien de l’action de résistance à proprement parler. Il nous fait ressentir dès la première image le climat d’oppression puis celui de la résistance. Il y transpire la méfiance et l’inquiétude, la mort guette à chaque instant. …Les corbeaux, les nazis, la milice, les forces de l’ordre, les espions… Il nous montre aussi l’esprit de résistance où seule l’abnégation est estimable. Il décrit une organisation interne, pyramidale, cloisonnée, avec un mode de communication prudent, un système de décision souvent binaire, dicté par les seules nécessités de survivre en tant que mouvement de Résistance.
Ajoutons à cette tonalité angoissante, la tonalité des rapports humains altiers, aristocratiques des chefs de guerre avec leur base. Nous ne connaissons plus ces codes de domination vieille France –Il y en a d’autres désormais– La vision élitaire de Melville concernant les chefs de la Résistance est confortée par sa direction d’acteurs.
Tonalité angoissante, tonalité autoritaire, ce film est sorti en salle en novembre 1969, donc après mai 1968. En avril 1969, Charles de Gaule cesse d’exercer ses fonctions de Président de la République et si parmi les ombres de « l’armée des ombres » plane celle du Général et du monde d’hier, c’est aussi qu’elle plane dans l’esprit de Jean-Pierre Melville au moment où il réalise son film.
Georges