Après avoir vu – L’arbre aux papillons d’or, je m’interroge sur mon attente de spectatrice.
Je ne m’en cache pas, je ne l’ai pas apprécié ce film. Je ne me suis pas senti à l’aise dans cet univers.
J’y ai vu quelques images qui restent en mémoire, j’y ai entendu de multiples sons, une bande originale belle et variée mais tout cela vécu dans un profond inconfort auquel je réfléchis depuis.
J’ai cloisonné d’instinct le film en deux parties. La première faite de bruit et d’agitation. Même si le personnage principal semble un jeune homme très calme, tout ce qui l’entoure est très sonore. Sonore au point que l’on discerne très distinctement des conversations (plusieurs, le vent très fort, les bruits de la ville…) le tout au même niveau m’a-t-il semblé, au point d’en ressentir un réel malaise.
Même le passage à la campagne reste très bruyant. Bruit de moteur, conversations, oiseaux, tout cela également très présent, trop présent à mes oreilles.
Puis une scène semble mettre fin à cette cacophonie. Une scène ou le coq servant d’appât chante et ainsi attire les autres coqs sauvages. Seuls résonnent leurs cris qui semblent de plus en plus proches, une sorte de pression monte presque effrayante, on attend l’attaque. Qui ne manque pas d’arriver d’ailleurs… Ensuite l’écoute devient plus agréable, on s’apaise.
Il y a évidemment des jolies scènes dans l’Arbre aux papillons d’or.
J’ai beaucoup aimé celle des quatre mains, celle de l’enfant et de son oncle qui tapissent le sol après avoir enterré l’oiseau, petit compagnon venu de la ville avec l’oncle et son neveu pour enterrer une maman pour l’un et une belle-sœur pour l’autre.
Les paysages sont naturellement beaux mais on ne sent jamais le besoin chez le réalisateur de les sublimer. Ils sont là, tout simplement faisant partie du décor et me laissent insensible. Je l’ai vécu avec beaucoup de frustration.
La relation entre l’homme et l’enfant, sans gestes tendres en apparence, ou si peu, semble malgré tout, forte et importante pour les deux. Tout semble se mettre vite en place entre eux. Pas de larmes, des questions parfois sans réponses pour le petit. Toutefois une confiance s’installe très naturellement. L’oncle est à l’écoute de son neveu. Peut-être la relation est-elle déjà ancienne ? On ne sait pas.
La quête du père de l’enfant, disparu depuis longtemps, devient également quête spirituelle entre religion et nature, les deux s’imbriquant pour notre héros.
La religion, est-elle ce que recherche Thiên dans son chemin de vie à ce moment de son existence ? Ou bien l’amour quand il retrouve une jeune femme aimée plus jeune, qui ne l’a pas attendu et qui a choisi d’entrer dans les ordres. Non par dépit mais par envie, elle l’avait d’ailleurs prévenu qu’elle ne l’attendrait pas. Elle se rappelle à lui dans une scène repensée quand il se rend sur les lieux de cet échange.
D’ailleurs, la question de la religion s’invite dès le début du film, dans la conversation entre les trois amis autour d’un verre. La question est posée autour de son importance et de la place à lui donner. L’un la pense importante, l’autre la rejette, et Thiên interrogé reste dans l’interrogation à ce moment précis.
Nous n’aurons jamais la réponse puisque survient l’accident tout près d’eux. Le choc ! Rien n’est édulcoré. La collision entre les deux motos est violente, mortelle. On n’assiste pas à l’accident mais l’image qui s’impose, quand telles les personnes qui accourent, nous découvrons l’après, cru et terrible. Deux véhicules que l’on distingue à peine et un petit enfant allongé, immobile au milieu de ces monceaux de tôles.
Voici l’entrée en scène du neveu, petit garçon de 5 ans.
Dans plusieurs scènes, l’approche de la caméra, la superposition de cadre est très intéressante et inédite pour moi, tel la fenêtre ou l’on voit Thiên de dos qui écoute les paroles de l’ancien, le vieux vietnamien qui raconte la guerre, sa guerre, montre ses souvenirs au personnage principal qui écoute patiemment et semble-t-il avec intérêt. L’ancien qui fait le choix maintenant de s’occuper des morts du village et d’ailleurs rencontré lors de la cérémonie pour la maman du petit garçon.
Ce n’est pas un travelling tel qu’on a l’habitude de les voir, cela se fait de façon séquentielle, comme des sauts de puce vers l’objectif qui est dans le cas présent, le visage de l’ancien. Il est invisible tout d’abord, seulement matérialisé par sa voix et les mots qui l’accompagnent.
L’ancien est catholique lui aussi, il fait partie de la communauté du village, et l’on remarque chez lui vierges et croix de toutes sortes au milieu des photos de soldats, de famille. Toute une vie défile doucement et très lentement devant notre regard. On devine qu’il vient alimenter la quête de Thiên.
La lenteur est toujours très présente dans ce film… Même lorsque le personnage circule à moto pour se rendre dans le village de sa famille et qu’on le suit de dos. Peut-être pour différencier la vie citadine de la campagne… Peut être…
Une dernière scène très belle clôture le film, scène dans laquelle notre quêteur semble avoir trouvé quelque chose… Peut-être la fin du voyage ? En s’allongeant dans le lit de la rivière, il devient ici élément de la nature, il se mêle à ce qui l’entoure tout naturellement.
Ni minéral, ni végétal mais autre et tellement, m’a-t-il semblé, à sa juste place.
À la relecture de mes mots, je me dis que malgré le sentiment d’être passé à côté du film, je peux, après quelques jours, y trouver des pistes, des idées, des ressentis. De quoi nourrir mes réflexions.
Qu’aurais-je aimé trouver pour apprécier ce film ?
– Peut-être un personnage plus marquant, attachant.
– Peut-être un peu d’humour qui manque terriblement dans ce film. Le seul moment où les spectateurs sourient ou rient et lors de la rencontre avec le samaritain qui offre de l’alcool pour la moto en panne quand il dit : « qui se promènent avec de l’essence sur une moto ? » nous avons souri en spectateur d’une autre culture mais était-ce bien l’idée du réalisateur ? Ce n’est pas certain.
– Peut-être des gestes tendres avec l’enfant qui auraient pu nous attendrir.
– Peut-être des paysages mis davantage en valeur…
Le tout nous est livré tout cru, sans fioritures, sans recherche de séduction de la part du réalisateur.
Tout ceci relève évidemment de mes propres réflexions qui n’ont pas valeur de vérité.
Il est intéressant toutefois de s’interroger sur ses motivations à voir un film et pourquoi tel film ? Qu’attendons-nous spectateur ? qu’allons-nous chercher ?
Fantasmons-nous le film en partant de l’affiche, de nos connaissances, de qui nous sommes ? La curiosité nous anime t’elle ou est-ce autre chose ?
En quoi le cinéma nous nourrit-il ?
Je n’ai pas nécessairement toutes les réponses mais je continue à y réfléchir car déçue par ce film, j’étais visiblement dans une certaine attente.
Sylvie C