A propos de Frantz et Anna

Prix Marcello Mastroianni du meilleur jeune espoir pour Paula Beer

Du 19 au 25 octobre 2016
Soirée-débat mardi 25 à 20h30

Présenté par Marie-Annick
Film franco-allemand (vo, septembre 2016,1h54) de François Ozon avec Pierre Niney, Paula Beer, Ernst Stötzner 
D’après un pièce de théâtre de Maurice Rostand

Le choix du noir et blanc actualise brillamment des histoires familiales du passé guerrier récent. De familles devenues franco-allemandes …
Les dialogues et les émotions sont pudiques.
Le mal, le malheur sont si profonds, intimes que mêmes les victimes se sentent coupables.
Le violon introduit une sensibilité supplémentaire qui réveille les sens des personnages.
L’échange difficile du violon concentre la somme des émotions enfouies ui
qui peinent à s’exprimer verbalement du fait même que les personnes sont comme retranchées, isolées dans une langue étrangère à l’autre …
Les grandes douleurs ne sont-elles pas muettes ?
Verlaine est cité : « les sanglots longs des violons de l’automne bercent mon cœur d’une langueur monotone ». Les cordes tendues du violon ne sont-elles pas aussi l’image des cordes vocales durcies par la souffrance de souvenirs tus ? Le violon n’est-il pas un instrument, un substitut éminemment sexuel que l’on sort de l’oubli ?
Entre Frantz et Anna, le mimétisme comportemental, amoureux, est fascinant …
Mais revenons un instant aux soldats.
A peine des chiens, moins que des hommes, sans paroles.
La musique adoucit les mœurs, sauf la militaire, répétitive, des tambours abrutissant les soldats, fascinés par la mort chantée, valorisée, recherchée

dans les paroles des marches militaires …

A la toute dernière image fugace du film, le visage d’Anna s’éclaire, se colorise, devient vivant … C’est qu’elle (séquelle ?) vient de voir « Le suicidé », tableau de Manet, sombre et horrible, qui l’encourage à vivre belle plutôt qu’à mourir moche. C’est la mort qui donne toute sa valeur à la vie …

Michel G

FRANTZ

Prix Marcello Mastroianni du meilleur jeune espoir pour Paula Beer
Du 19 au 25 octobre 2016
Soirée-débat mardi 25 à 20h30

Présenté par Marie-Annick
Film franco-allemand (vo, septembre 2016,1h54) de François Ozon avec Pierre Niney, Paula Beer, Ernst Stötzner 
D’après un pièce de théâtre de Maurice Rostand
Synopsis :Au lendemain de la guerre 14-18, dans une petite ville allemande, Anna se rend tous les jours sur la tombe de son fiancé, Frantz, mort sur le front en France. Mais ce jour-là, un jeune Français, Adrien, est venu se recueillir sur la tombe de son ami allemand. Cette présence à la suite de la défaite allemande va provoquer des réactions passionnelles dans la ville.

STEFAN ZWEIG, ADIEU L’EUROPE

STEFAN ZWEIG, 
ADIEU L’EUROPE

Nominé au Festival de Locarno
Soirée-débat mardi 18 à 20h30

Présenté par Laurence Guyon
Film allemand (vo, Août 2016,1h46) de Maria Schrader avec Josef Hader, Barbara Sukowa et Aenne Schwarz 
Titre original : Vor der Morgenröte 
Synopsis :En 1936, Stefan Zweig décide de quitter définitivement l’Europe. Le film raconte son exil, de Rio de Janeiro à Buenos Aires, de New York à Petrópolis.

Je n’ai pas aimé ce film… mais quoi donc ?

Il y a quasiment autant de lecteurs de Stefan Zweig que de spectateurs du film.  C’est un film qu’on souhaite voir après avoir peu ou prou lu Zweig.  Pour ma part, c’est plutôt peu, je l’avoue. J’ai fait sa connaissance avec « le joueur d’échecs » paru en feuilleton dans le journal Monde en 1972 à l’époque du match Fischer vs Spassky, j’ai souvenir d’une nouvelle peu vraisemblable et d’une  psychologie des personnages taillée à la hache. Les autres livres que j’ai pu lire de lui ne m’ont guère plus passionné, de sorte que je ne regrette pas mon aveux.

Le film m’est apparu classique (trop), bavard et lent, sans surprise. Bien sûr Joseph Hader est à la fois ressemblant, crédible, remarquable dans sa manière de réprimer ses sentiments, son embarras et sa détresse…tout en les rendant tout de même visibles en dépit de ce qu’il veut paraître. La manière furtive et délicate de nous montrer le couple mort est elle aussi parfaite. Mais, autant vous prévenir tout de suite, je suis au maximum du bien que je peux  dire de ce film.

Ce récit m’apparaît comme une théorie de mondanités exécrables, de discours véhéments et vains qui n’ont pour fonction que de contrebalancer les silences et prises de position éthiques neutralistes de Zweig. Le monde de Zweig qu’on nous présente est un monde de figurants.  On imagine que dans la vraie vie, cette contrainte éthique qu’il s’est imposé devait être mortifère.

Une spectatrice durant le débat faisait remarquer que les réfugiés politiques, s’ils sont des intellectuels connus, ont des devoirs vis à vis de ceux qui n’ont pas eu la chance de pouvoir fuir ou qui sont restés pour lutter. Mais on peut aussi imaginer que l’auteur « du monde d’hier » pressentait d’une manière péjorative le « monde de demain », ce monde de l’après nazisme, que nous les vivants, expérimentons désormais.

C’est le monde du présent qui semblait échapper à Zweig. Ses amis, à l’instar de Walter Benjamin s’étaient suicidés. Un autre  et génial ami, l’écrivain  Joseph Roth, qui si l’on en juge par leurs correspondances, avait des préventions plus fermes et une  anticipation plus aiguë  que celles de Sweig sur le national socialisme,  lui aussi s’est suicidé…d’une autre manière, plus lente, celle d’un pauvre et grand alcoolique, désespéré, mourant seul à Necker un jour de mai 39.

En dernier lieu, l’histoire et la littérature, le cinéma nous ont souvent montré des couples se suicidant. Chacun a  aussi en tête des cas concrets, des noms célèbres parmi les intellectuels du 20ème siècle. Et parmi les simples quidams, aujourd’hui encore, en Octobre 2016, un couple à Villejuif vient de se suicider parce qu’il ne pouvait plus payer son loyer.

Dans le suicide d’un couple, il peut y avoir des motifs et une volonté commune d’en finir, ça peut arriver. Ce que l’on voit aussi , c’est la mise à mort de l’un par l’autre, puis le suicide de l’autre, et parfois, au décours de ces tristes histoires, la mort d’un seul conjoint sur les deux. Enfin, on peut lire sur ces affaires, qu’il existe des mécanismes morbides où l’un tente de convaincre l’autre que la mort est la seule issue valable. (Un inducteur et un induit.) Les déprimés mélancoliques sont parfois de bonne foi, par désespoir, amenés à raisonner en ces termes. Ils veulent ainsi,  par la mort, protéger leur(s)  proche(s) d’une vie atroce dont le pire reste à venir.

Dans le cas de Zweig dont on sait qu’il était déprimé et de Lotte sa jeune épouse, nous avons un doute, celui là même exprimé dans un Figaro de  2010 « Cette femme qui s’était jurée de lui redonner goût à la vie était-elle aussi désespérée que son époux au foie noir ? (mélancolique) N’est-ce pas Stefan Zweig qui a voulu imiter Heinrich von Kleist, un écrivain qu’il avait célébré dans son essai « Le Combat avec le démon » en entraînant une compagne dans la mort ? ».

Dans ce film, Zweig est un homme seul qui meurt à deux.

…Et cette pensée pour Lotte à elle seule aurait suffit à me pourrir le film si d’aventure, le reste ne m’avait pas déjà semblé ennuyeux.

Georges

 

Celui qu’on attendait

CELUI QU’ON ATTENDAIT

Soirée-débat mardi 11 à 20h30

Présenté par Françoise Fouillé en présence du réalisateur Serge Avédikian
Film français (vo, juin 2016,1h30) de Serge Avédikian avec Patrick Chesnais, Arsinée Khanjian et Robert Harutyunyan

Nous espérons que vous avez passé une bonne soirée. Il y a d’abord le film qui mérite bien vos commentaires, ensuite la présence de Serge Avedikian, et le mot présence s’agissant de Serge Avedikian a ici son plein sens….

Nous profitons de cette invitation à commenter pour vous signaler dans Youtube, le dessin animé Chienne d’Histoire du même Serge Avedikian.  17 minutes bouleversantes ;  un film tellement actuel.

Bonne journée

LE SECRET DE VERONIKA VOSS

 

Cycle Rainer Werner Fassbinder 
LE SECRET DE VERONIKA VOSS
 

Article de Michel Grob

La nostalgie (die sehnsucht) de Véronika Voss

1955, Munich.
 Dans une Allemagne blafarde encore sévèrement défaite, des personnages incertains d’eux-mêmes semblent à la recherche d’un rôle à tenir.
D’où le choix du noir et blanc qui renvoie à un passé mythifié : Marlène Dietrich sera plusieurs fois évoquée à travers le chant et les postures de Véronika  Voss. La blancheur répétée des scènes chez Mme Katz, psychiatre bourgeoise, souligne le blanc, le trou de mémoire, l’amnésie généralisée qui gouverne les corps et les esprits. L’alcool, la morphine tentent d’endormir les corps souffrants dans un somnambulisme
nocturne…
Douloureux et tragique, le passé surgit avec le vieux couple des déportés juifs dont l’élégance, l’humanité, et la dignité surprennent. Un beau vase précieux est offert, puis brisé, et  enfin remplacé à l’identique comme une transmission presque impossible …
 L’omniprésence muette d’un GI noir est le réel fil d’Ariane du film.
A la fin du film, un plan fixe parodie les producteurs, les réalisateurs et les acteurs de la Métro Goldwin Meyer.
Epuisé, vieillot, le son des cloches est parasité puis subvertit par l’arrivée du rock and roll, énergique et revigorant ! Humour …
A la Prusse impériale défunte succèdera la République impériale (R. Aron) des Etats-Unis comme influence déterminante. Plus précisément encore, la République Fédérale d’Allemagne Unie intégrera le songe du territoire communiste en le dissipant. D’où le vagueà l’âme (die sehnsucht) des marxistes ! Humour …
Michel Grob

EL ACOMPAGNANTE

EL ACOMPAÑANTE
Prix du public aux festivals de Miami et de la Havanne
Semaine du 29 septembre au 4 octobre2016
Soirée-débat mardi 29 à 20h30

Présenté par Sylvie Braibant en présence du producteur Edgar Tenembaum
Film cubain (vo, août 2016,1h44) de Pavel Giroud avec Yotuel Romero, Armando Miguel Gómez et Camila Arteche
 

Aux cramés de la bobine, nous avons la chance de voir des films rares, les films cubains ne sont pas si courants, et souvent ils sont bons. C’est le cas de celui-ci -Notre gratitude à Edgar Tannenbaum son producteur –

J’espère que ce film sera commenté, il y a tant de choses à souligner. Nicole, une spectatrice faisait remarquer que ce film avait une analogie avec « Folles de joie », présenté il y a peu :  La rencontre de deux personnes que rien n’aurait dû mettre en contact, sauf la situation et le lieu dans lesquels ils se trouvent placés à leur corps défendant. Il y a de même chez les deux personnages, ce désir d’en sortir,  de se faire la belle, l’attrait des grandes largeurs.

Là s’arrête l’analogie, car la question de la mort qui rode est spécifique   à ce film. Elle est majeure quand ce  jeune homme naguère débordant d’énergie,   maintenant épuisé,  couvert de kaposi, s’autorise à perdre son match pour la vie,  lorsqu’il sait que son ami  boxeur va gagner le sien… sur le ring,  grâce à son conseil.

Ce film rend compte d’un système efficace de prévention de la transmission du SIDA dans les années 80, et en même temps décrit, exprime  une organisation totalitaire. Un système d’enfermement, où l’on passe de sujet à objet, où tous les besoins des sidéens sont déterminés de l’extérieur. Nous voyons là, la résurgence d’une forme  de soins, pas si rare dans l’histoire.  Une forme de soin qui n’a qu’un prix, celui de la liberté.

Pouvait-on imaginer un tel dispositif pour faire face au SIDA ailleurs qu’à Cuba ?  Cuba nous apparait comme un pays à la fois autoritaire et égalitaire. En même temps,  c’est une île,  doublement isolée à cause des rétorsions américaines.  Par ces côtés là, cet hôpital prison partage quelques traits avec son pays.

Dans ce contexte de prison, de soins, de mort, et de violence parfois,  au fur et à mesure, on a  l’impression que le cadre rigide du système s’efface pour laisser place à l’humain. Et  cette humanité là, dans cette société là exprime aussi la fraternité. A mauvaise fortune, bon coeur dit le proverbe. Quant à l’idéal de liberté, dans le coeur de tout homme, il l’est plus encore dans celui des prisonniers.

On ne peut s’empêcher de spéculer sur Cuba d’aujourd’hui. C’est le début  d’autre chose,   la fin de l’isolement, la liberté sans doute,  mais aussi  « les libertés », par exemple, celle  d’expulser – Cette autre forme de la violence et de  l’exclusion-  Mais ceci est une autre histoire.

Georges