BIRD -Andrea Arnold

BIRD, film d’Andrea Arnold, m’a embarquée!

Comme dans un fragile esquif, au début ça tanguait. A l’invitation de l’oiseau qui tournoie dans le ciel ou de celui qui commence une sorte de conversation sur la passerelle, je suis partie confiante. Ensuite, de plus en plus c’est devenu terriblement inconfortable, avec des images qui sautent, qui sursautent, qui courent presque et bouleversent jusqu’à la nausée. Je ressentais une angoisse, un désarroi. Puis soudain plan fixe sur les fleurs de la prairie, sur les herbes blondes qui se couchent sous le vent. L’enfant, qui s’est enfuie du squat familial pour échapper à la folie d’un père extravagant qui la ramène à la maison sur sa trottinette électrique, puis lui annonce son mariage et exige qu’elle essaie une combinaison mauve aux motifs de panthère qui sera son costume de demoiselle d’honneur, a traversé, surmonté, laissé derrière elle le quartier, la violence, les multiples passerelles et passages sous grillages qui mènent à la prairie. Elle s’affale, s’apaise et s’endort, malgré les vents violents qui bousculent les grandes herbes. A ce moment-là, je suis embarquée. La nausée, l’angoisse, le désarroi sont les siens. Je les partage, je suis aux aguets, prête à trembler avec elle. Après la violence verbale et l’incohérence du père annonçant son mariage, quel contraste soudain, au matin, sous la douceur du cheval blanc qui souffle et approche !

Depuis les premières images, cette enfant, Bailey, armée de son téléphone, filme tout, les oiseaux, les scènes familiales, la nature et jusqu’aux naseaux du cheval qui s’avance. Elle ne subit pas. Elle est active. Elle est volontaire, énergique et très forte.

C’est dans la prairie qu’apparaît soudain l’homme vêtu d’une jupe aux mouvements souples et dansants, qu’elle refuse d’abord de rencontrer, puis qu’elle suit et qu’elle recherche : I’m BIRD. Bird, c’est son nom. Est-il réel ? Bailey n’en doute pas. Elle va même lui fournir le moyen de retrouver son père. Mais le spectateur continue de s’interroger tout au long du film. Par exemple au moment de la confrontation avec le supposé père de Bird. Celui-ci dit que son fils est mort. Bird serait-il un fantôme ? Dans le bus qui les ramène de la plage, Bailey fait le test de la « brûlure indienne » : elle serre le poignet de Bird dans ses mains qu’elle tord chacune en sens opposé, jusqu’à provoquer une douleur insupportable de brûlure. Elle a douté. Elle se rend à l’évidence, il est réel.

Bailey est familière des oiseaux, de celui qu’elle filme au tout début, de ceux qui l’accompagnent, qui la protègent, de celui qui porte un mot à l’amie de son frère, Hunter. Bird est un autre oiseau, une autre réalité, la force de son imaginaire, l’expression de sa confiance dans la vie, la légèreté qui lui fait surmonter la noirceur des squats, de la brutalité, de la violence, des dangers. C’est ce qui fait d’elle une championne de l’espoir.

Marie-Odile

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