Langue étrangère de Claire Burger


Native de Lorraine, proche de la frontière franco-allemande, la réalisatrice de – Langue étrangère exprime avoir un rapport particulier à la double culture.
Elle souhaitait en écrivant le film en période Covid, période o combien perturbante pour tous, que – Langue étrangère incarne l’Europe qu’elle voit comme la promesse d’un avenir. Elle voit le passage d’un pays à l’autre comme un pont vers l’Europe espérée.
La montée de l’extrême droite, qui vient bousculer cette construction lui a donné l’idée de ce film comme une métaphore des amitiés franco-allemandes en mettant en avant les différences de vision des deux côtés et le poids de l’histoire. Les parents, les grands parents apportent ainsi leurs pierres à l’édifice dans leurs propres histoires, leurs origines et leur passé. On sent que tous sont déstabilisés, un peu perdus et regardent vivre leurs ados sans parfois trop comprendre ce qui les animent et semblent impuissants à les aider.

Claire Burger, en observant cette jeune génération a pu constater les difficultés de beaucoup d’adolescents, de jeunes adultes. L’anxiété, l’angoisse, la peur du devenir influent ainsi sur des comportements allant parfois jusqu’au pathologique. Léna la jeune allemande le dit dans le film : j’ai peur de tout…. Vieillir, le fascisme, que rien ne change…
Toutefois la réalisatrice souhaitait amener de l’émotion dans toutes ces choses théoriques. L’histoire d’amour qui nait entre les deux filles apporte douceur et humanité.
La rencontre entre les deux correspondantes ne se fait pas simplement. Très vite, Fanny la jeune française l’exprime par cette jolie phrase : « Ma correspondante ne me correspond pas « mettant ainsi en relief ce que représente ces échanges linguistiques et culturels.
Finalement, elles finiront par se correspondre et s’accorder autour de ce qui les rapproche. Ainsi pour s’accorder à Léna, Fanny franchit le pont jusqu’à inventer une sœur rebelle, une sensibilité politique pas forcément naturelle pour elle. On la sent fragile dans ses opinions, guettant toujours l’assentiment de sa correspondante, moins ferme dans ses convictions et très seule. Il lui est certainement plus facile de mentir pour s’adapter à l’autre que de se dévoiler. On apprend que le mensonge est chez elle une façon d’être, qu’elle invente et on ne sait plus trop parfois qu’elle est la part de vérité et de leurres.
Les deux comédiennes tout en subtilité nous font vivre la rencontre, l’évolution de la relation, les difficultés familiales, la vie des adolescents d’aujourd’hui, pas si différente de notre propre adolescence. Les aspirations restant proches avec toutefois moins de légèreté peut être. Comme moins de promesses à venir …
La chute du mur, les événements la précédant à Leipzig et l’histoire de la seconde guerre mondiale évoque les difficultés à construire toute relation. L’histoire entre les deux jeunes filles peut être vue comme une métaphore de ce que l’Europe peine à mettre en place de façon solide.

Toutefois la fin, qui on le ressent installera chez les deux ados quelque chose de nouveau nous laisse sur une note positive. La rencontre, l’alliance a bien eu lieu.
Quant à son devenir ? tout reste à dessiner. Tout comme notre propre histoire dans la grande à venir.

Sylvie






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