Mademoiselle de Jonquières (2)

Image associéePrêcher le faux pour savoir le vrai, quelle folie ! Madame de la Pommeray, consciente de son échec à vouloir changer des Arcis, séducteur forcené, en fidèle compagnon, en fait le constat douloureux. Le film est délicat, délicieux dans sa façon de montrer l’évolution des sentiments de cette marquise étonnante.
D’abord, elle se délecte du récit des conquêtes de son ami, le gronde gentiment pour son inconstance, ravie d’entendre ce qu’il réserve à d’autres, ailleurs , là-bas, à Paris. Elle s’est retirée du monde et vit dans sa verte campagne où tout est calme et où il fait toujours beau. Ses toilettes s’accordent aux couleurs pastels des fleurs foisonnantes de son parc verdoyant, fleurs coupées dont elle orne les vases à leurs places idéales dans les vastes pièces lumineuses de sa demeure,
reflet de sa paix intérieure.

Mademoiselle de Joncquières : Photo Cécile de France, Edouard BaerMais des Arcis a pour mission de séduire et la séduire aussi. Il s’y emploie, elle résiste, il la veut , elle baisse la garde et succombe. Son expression en est transformée. Le sourire de courtoisie est devenu sourire de contentement. Des Arcis fait connaître à cette jeune veuve sans expérience des sens, les plaisirs de la chair. Elle rayonne, illuminée de ses extases. La scène où le marquis lui prend son livre et le pose sur le sien à coté d’eux sur la banquette, la caméra restant sur ces deux livres se chevauchant en est l’illustration.
Et puis ses yeux se voilent, elle ne veut pas mais c’est arrivé. Le charme est rompu, il s’éloigne … Ses mains s’agitent, tout est changé, les vases ne sont finalement pas à la bonne place, elle les intervertit et force est de constater qu’ils allaient mieux à leur place d’avant. L’inquiétude est devenue chagrin. Tombé dans le piège, il est parti, léger, belle nature !

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La marquise, elle, chancelle, pleure beaucoup. Mais ne s’éteint pas. Elle réfléchit et son sourire de convenance revient.

L’orgueil l’emporte sur la peine.
La deuxième partie du film va montrer le déroulement, pas à pas, du plan machiavélique mis en place pour assouvir sa vengeance. Pour cela, sans vergogne, elle va se servir de deux malheureuses « créatures », en usant, en abusant, dénuée de tout sentiment ni de compassion, ni de regret, ni de remord. Seule la déchéance du marquis lui importe. Qu’il soit la risée de tous, qu’il soit banni de leur société ! Sa coiffure a changé, l’anglaise désormais serrée dans le chignon et les toilettes de la marquise sont devenues criardes, soie jaune poussin, associée même parfois à de la  dentelle noire, goût de catin.
L’estocade finale la montre dépassionnée, misérable de médiocrité, presque détruite.
Alors que le marquis, en bon épicurien et bien obligé de se faire une raison, choisit de profiter de ce que sa situation lui apporte : une jeune épouse ravissante, conquise, sincère. Et honnête. Et peut-être même, grâce à la vengeance de son ancienne amante, trouvera-t-il le bonheur …

Ironie du sort ! Voilà bien ce qui serait le coup de grâce pour Madame de la Pommeray : que des Arcis soit heureux !

Ce film m’a ravie, les acteurs sont épatants. Bravo à Cécile de France qui se sort brillamment de ce contre emploi.
Sans surprise, Edouard Baer est formidable !
Du beau travail, sans de très gros moyens. Comme quoi …
Enfin, Emmanuel Mouret place son talent dans un écrin qui lui convient parfaitement.

Marie-No

 

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