Lundi 22 juillet
9h 30. Louise Michel…
(2008. « Quelque part en Picardie, le patron d’une entreprise vide son usine dans la nuit pour la délocaliser. Le lendemain, les ouvrières se réunissent et mettent le peu d’argent de leurs indemnités dans un projet commun : faire buter le patron par un professionnel[1] »)
… tourné en un mois par Gustave Kervern et Benoît Delépine, en vacances de Groland sur Canal +. Ils ont envie d’aller plus loin en se tournant vers le cinéma et une histoire (le film ne se fera pas tel quel) d’handicapés qui ont envie d’aller en Finlande voir Aki Kaurismaki. Quant à leur deuxième réalisation, expérimentale, elle est hermétique.
Louise Michel : inspiré d’un fait divers. Toujours des sujets graves de société.
Kervern et Delépine : pas de laïus sur la psychologie des personnages. Ne font pas beaucoup de prises. Sont contre la direction d’acteurs. L’acteur espère aller dans le sens voulu par le réalisateur, il est friand de ce qu’on peut lui proposer → Bouli Lanners regrette un manque d’indications (« on nous parle pas ») → au lieu de ça, Kervern applaudit.
La fiction au cinéma : tant mieux si en sortant on a un sujet de réflexion, si on en est un peu grandi.
Bonheur de revoir le Familistère, dehors d’abord, avec la statue de Godin, dedans ensuite, grande cour sous verrière, étages d’appartements. Mais celui des parents de Bouli Lanners était-il réellement l’un d’entre eux ? Pas sûr.
Plus tard. Au départ, Yolande Moreau refuse de jouer dans Mammuth parce qu’elle trouve le film misogyne. Un jour, elle reçoit un coup de fil de Depardieu : « Ils envoient le gros au charbon ! ». Elle et lui doivent s’embrasser : « Depardieu a un gros ventre, moi aussi » (petit rire dans les yeux). Ça a été très vite, en deux prises.
14h. Henri…
(2013. « Henri, la cinquantaine, d’origine italienne, tient avec sa femme Rita un petit restaurant près de Charleroi, « La Cantina ». Une fois les clients partis, Henri retrouve ses copains, Bibi et René, des piliers de comptoirs. Ensemble ils tuent le temps devant quelques bières en partageant leur passion commune, les pigeons voyageurs. Rita meurt subitement, laissant Henri désemparé[2] »)
… deuxième film (en solo) de Yolande Moreau, le seul d’elle (ou avec elle) de la sélection que je n’ai jamais vu (ne connaissais même pas son existence).
Avec Pippo Delbono, comédien italien qui déteste les pigeons et a pris sur lui pour le rôle.
Avec aussi Miss Ming, rencontrée lors du tournage de Louise Michel. Comédienne atteinte de handicap…
(Comme les acteurs de la compagnie roubaisienne de l’Oiseau-mouche, souffrant tous d’un déficit mental, que Yolande Moreau embauche « pour la totalité du tournage pour
effectuer de la figuration voire quelques seconds rôles de plus grande importance[3] »)
… ce qui la relie à Pippo Delbono qui avait sorti Bobò de l’asile…
( « Atteint de microcéphalie et sourd-muet, Bobò [est] interné à partir de 1952 dans un hôpital psychiatrique à Aversa [où] il est remarqué par le metteur en scène italien Pippo Delbono, venu organiser un atelier théâtre en 1995. « Il avait quelque chose de doux et de poétique. Une tendresse… quelque chose de rare ». Delbono le prend en charge et en fait dès lors son comédien fétiche, le plaçant au cœur de toutes ses mises en scène. Bobò meurt des suites d’une pneumopathie bronchique le 1er février 2019[4] »)
… et qu’il a intégré à tous ses spectacles jusqu’à sa mort.
Pas eu l’autorisation d’utiliser le nom de Les Papillons blancs…
(Association « créée par des parents d’enfants en situation de handicap mental en 1949, « les Papillons blancs de Paris », régie par la loi de 1901, œuvre pour la défense des intérêts matériels et moraux, la recherche de l’épanouissement, le développement de l’autonomie des personnes en situation de handicap mental/cognitif ; et le soutien de leurs familles. Elle contribue à la sensibilisation de la société au handicap[5] »)
… comme titre du film → Henri, un peu terre à terre.
Rencontre d’un homme éteint avec quelqu’un qui a envie de normalité.
Pas de flot de paroles qui explique tout.
Yolande Moreau affectionne les petits personnages dans la vastitude de grands espaces + les films pas bavards (mais elle aime bien les mots). Il y a plein de manières de faire des films.
17h. Slow…
(2023. « Elena, danseuse et Dovydas, interprète en langue des signes se rencontrent et tissent un lien profond. Alors qu’ils se lancent dans une nouvelle relation, ils doivent apprendre à construire leur propre type d’intimité[6] »)
… film lituano-hispano-suédois de la Lituanienne Marija Kavtaradze. Du sexe et de la danse filmée en plans rapprochés, ce qui est une aberration → le prix de la mise en scène au festival de Sundance aussi.
21h 15. Dans le parc du château Pams. My beautiful laundrette…
(1985. « Dans la banlieue sud de Londres, un jeune immigré pakistanais entreprend par tous les moyens de sortir de la pauvreté. Son oncle Nasser, un affairiste douteux, lui confie alors une laverie automatique décrépite. Avec l’aide de Johnny, un voyou anglais, il va tenter d’en faire une affaire rentable[7] »)
… de Stephen Frears, en sa présence (ça y est, il est arrivé ! En 2012, à l’occasion des JO de Londres, les Ciné-Rencontres avaient déjà organisé une rétrospective de ses films mais sans lui). Ovation.
N.T. Binh : Comment trouvez-vous Prades ? S. Frears : Je ne savais pas que ça existait.
Il dit que le scénario…
(De Hanif Kureishi, qui est venu à lui. C’est le deuxième grand écrivain d’origine pakistanaise né en Grande Bretagne. Il fait partie de la seconde génération de Pakistanais -les pères sont arrivés par bateau-. Voulait faire une sage façon Le Parrain)
… de My beautiful laundrette lui avait semblé stupide mais qu’il l’avait fait rire. Choix de faire une comédie légère mais avec quelque chose en plus.
Pour le rôle de Johnny, Daniel Day-Lewis l’a emporté sur Tim Roth et Kenneth Branagh grâce aux filles (« Il est beau ! »).
Mardi 23 juillet
Quand j’écrivais avoir vu tous les films de Stephen Frears projetés en ces Ciné-Rencontres, j’aurais dû préciser « de fiction » car je ne connais pas celui de
9h, A personal history of british cinema (1995), partie d’un projet international pour les 100 ans du cinéma. Récit à plusieurs voix : entretiens d’une part de Frears avec un critique et Alexander Mackendrick, réalisateur américain…
(Né à Boston de parents émigrés mais, suite à la mort de son père, élevé à partir de l’âge de sept ans par son grand-père écossais. Il étudia à la Glasgow School of Art)
… qu’en raison de son nom et de nombre de ses films je croyais britannique, d’autre part avec des cinéastes anglais (Michael Apted et Alan Parker) ayant fait carrière aux USA.
Film autobiographique (ses propres mémoires cinéphiliques) d’un réalisateur aimant le cinéma. Appartient à une génération nourrie des classiques hollywoodiens. A commencé comme assistant avec la Nouvelle vague britannique.
10h 45. Espace Jean Cocteau, rencontre avec Stephen Frears.
A fait ses classes sur Charlie Bubbles (1967) d’Albert Finney.
Puis a travaillé sur If (Lindsay Anderson, 1968).
Reçoit ensuite une subvention du British Film Institute pour réaliser un film de trente minutes se passant en Afrique du Sud (The Burning, 1968) et tourné à Tanger.
Rencontre le scénariste Neville Smith qui écrit son premier long métrage, Gumshoe, histoire d’un personnage incarné par Albert Finney qui « passe son temps à s’identifier aux personnages de détectives privés imaginés par Dashiell Hammett ou par Raymond Chandler. Fasciné jusqu’à l’obsession par Humphrey Bogart, il fait passer une annonce dans les journaux sous le nom de Sam Spade[8] ». Les Britanniques : obsédés par la culture américaine. Travaille pour la BBC (c’est très mal payé mais on a une totale liberté) comme Ken Loach…
(Il a inventé les téléfilms et révolutionné la façon de filmer : si on peut tourner une semaine en extérieur, pourquoi pas un film entier)
… et Mike Leigh, tous trois individus excentriques issus de l’éducation britannique, dont l’ego ne se met pas en avant au détriment de l‘histoire.
Va à Hollywood…
(Tous les cinéastes du Royaume-Uni veulent aller aux USA mais Hollywood est une industrie dure : difficile de survivre là-bas)
… mais en gardant les pieds sur terre. S’est aperçu combien c’est effrayant…
(Hitchcock a pris son temps avant de faire des films américains. Son premier film aux USA a été Rebecca qui se passe en Angleterre et est interprété par des acteurs britanniques)
… mais personne n’a été méchant avec lui. A eu la chance qu’après avoir vu My beautiful laundrette Martin Scorsese lui demande de réaliser Les Arnaqueurs.
A eu un projet (non réalisé) sur Martin Luther King après The Queen. Reçoit alors celui d’une adaptation de Colette, Chéri (voir plus bas).
Qu’est-ce que la justice a à voir avec la loi ? demande Stephen Frears à propos de je ne sais plus quoi, avant d’ajouter avec un rire dans la voix, Je dis n’importe quoi…
14h. Chéri…
(2009. « Dans le Paris du début du XXème siècle, Léa de Lonval finit une carrière heureuse de courtisane aisée en s’autorisant une liaison avec le fils d’une ancienne consœur et rivale, le jeune Fred Peloux, surnommé Chéri. Six ans passent au cours desquels Chéri a beaucoup appris de la belle Léa, aussi Madame Peloux décrète-t-elle qu’il est grand temps de songer à l’avenir de son fils et au sien propre[9]… »)
Juliette Binoche est d’abord pressentie mais elle est trop jeune pour le rôle qui échoit finalement à Michelle Pfeiffer.
Provoquer l’adhésion du spectateur envers un personnage (Chéri) plus ou moins antipathique.
Derrière la façade couve un volcan : ce monde va disparaître avec la Première guerre mondiale.
Allez savoir pourquoi…
(It’s a disaster, dit Stephen Frears de son film. Il a fait une erreur dès le début mais ne tient pas à nous dire laquelle. Tout ce que nous saurons c’est que, intimidé par la mythologie qui entoure Colette, il n’a pas trouvé la manière de la filmer)
… le cinéaste n’aime pas Chéri. Les spectateurs lui trouvant des qualités, J’aurais dû avoir cette conversation avec vous avant de faire le film, conclut-il.
Ce que je ne m’explique pas : pourquoi alors avoir mis le paquet sur Chéri (choix de le projeter + une photo du film sur l’affiche des Ciné-Rencontres) ?
Quoi qu’il en soit, Michelle Pfeiffer « Nounoune » habitant l’hôtel Mezzara, ça me donne la joie de revoir la belle façade (je ne saurais dire avec certitude si les intérieurs sont aussi les siens, l’escalier peut-être) de cette œuvre d’Hector Guimard visitée avec JC le samedi 9 décembre 2017 (sept ans, déjà).
17h. Paradise is burning…
(2023. « Dans une région ouvrière de Suède, trois jeunes sœurs se débrouillent seules, laissées à elles-mêmes par une mère absente. La vie est joyeuse, insouciante et anarchique, loin des adultes, mais interrompue par un appel des services sociaux qui souhaitent convoquer une réunion. Laura, l’aînée, va alors devoir trouver quelqu’un pour jouer le rôle de leur mère sous peine d’être emmenées en famille d’accueil et séparées[10]… »
Mouais…
Et c’en est fini pour moi aujourd’hui. Ce soir c’est Séraphine et la projection a lieu en plein air dans le parc du château Pams, à point d’heure (21h30), il faut attendre que la nuit soit tombée, en plus je l’ai revu récemment, l’ai bien en tête et besoin de me reposer.
[1] https://www.senscritique.com/film/louise_michel/432284
[2] https://www.unifrance.org/film/35400/henri#
[3] https://www.lavenir.net/regions/wallonie-picarde/2012/10/19/un-casting-des-plus-heteroclites-DJGNJ74S
[4] https://fr.wikipedia.org/wiki/Bob%C3%B2
[5] https://www.lespapillonsblancsdeparis.fr/notre-association/
[6] Catalogue des Ciné-Rencontres
[7] Id.
[8] https://www.senscritique.com/film/gumshoe/376923
[9] https://www.google.com/search?q=ch%C3%A9ri+film&sca_esv=0d4a60feda95d33d&source=hp&ei=
[10] Catalogue des Ciné-Rencontres