Synopsis : Fils d’immigrés algériens, Zino a grandi persuadé que Farid, son père, les a abandonnés, sa mère et lui. A la mort de cette dernière, il apprend par le notaire que Farid n’est pas retourné en Algérie, mais qu’il réside encore en France, quelque part en Camargue. En plus, contrairement à ce qu’il croyait, ses parents n’auraient jamais divorcé. Décidé à en savoir plus, Zino part en moto sur les traces de son père dans le Sud de la France. A l’adresse de celui-ci, il rencontre Lola, professeure de danse orientale. Cette dernière finit par lui avouer qu’elle est Farid. Zino a du mal à l’accepter.
Vu à Fontainebleau : Ce drôle de film Lola Pater qui doit déranger, qu’on prend avec des pincettes et qui suscite parfois des polémiques, par exemple, je tombe sur celle du « Causeur» . Il reproche à «Libération» de préférer pour ce rôle un « LGBT* à une comédienne douée ».
Du coup, j’ai lu l’article de Jeremy Piette dans «Libération», il mérite mieux que ça, je vous le recommande. «Le Causeur» en a coupé beaucoup (sans mauvais jeu de mot).
Alors filons au «Monde» et lisons Thomas Sotinel : « Pour Fanny Ardant, la question se pose autrement. Son visage, son corps sont intimement liés à une série de portraits de femmes…nos souvenirs de cinéma lui ont construit une biographie imaginaire dans laquelle le passé masculin de Lola peine à trouver une place. Mais l’imagination (ou le manque de) est un trait individuel, et cette incapacité à croire à l’histoire de Lola n’affectera pas tous les spectateurs ».
Avec la question du sexe des transsexuels, nous avons la question du sexe des anges que nous pouvons ! Et c’est curieux de voir comment le cinéma s’est emparé du sujet, plus de 70 films lui sont consacrés, et tenez-vous bien, il y en a un qui date de 1954, mais attention, jusque dans les années 80, il s’agit souvent de travestis et non de transsexuels, ou alors de transsexuels à leur corps défendant, bourrés d’œstrogènes, ou opérés « à l’insu de leur plein gré », et le genre de ces films est souvent comédie ou film d’horreur. Or, la consécration, le sérieux, c’est le drame. Et pour ça, « les trente glorieuses » du film sur les transsexuels, ce sont les années 1990 à 2010, leur production/distribution en belle courbe de gauss …16-32-16… en atteste.
Et Lola Pater là-dedans, dans cette production, doit certainement être honorable. Regardons cette Lola, si Fanny Ardant ajoute à l’ambiguïté pour les raisons que donne Thomas Sotinel, son personnage en rajoute par construction. Il y a du sel, d’abord Lola est algérienne, artiste, elle vit avec une femme qui l’aime. Ensuite, elle est père d’un enfant dont elle a été tôt séparée, au moment où elle a choisi de devenir femme. Elle est amenée à le revoir alors qu’il est devenu un beau grand jeune homme. Lola a cette souffrance des exilés, elle l’est à différents titres. Fanny Ardant, subtile, sait nous faire sentir ça. Mais tout se passe comme si la souffrance de cet être n’était que sociale, comme si la dimension psychique du transsexualisme ne tenait au fond qu’au regard des autres… et Lola, ce père qui renvoie le regard de son fils, avec les doux yeux d’une mère fatiguée qui retrouve sa progéniture, ne nous cache-t-elle pas le regard qu’elle porte sur elle-même, sur cette souffrance essentielle, en son for intérieur (qui ne s’explique pas seulement par les autres, ici et maintenant).
Et je me demande si les« trente glorieuses » en question n’ajoutent au déni de la souffrance psychique avec cette manière de traiter du transsexualisme, et si Lola Pater n’ajoute pas à ce déni.
Mais sinon, c’est un film qu’on peut voir, il est plutôt honnête et bien fait, on ne s’ennuie aucunement et puis… Il y a Fanny Ardant, très bien entourée.
*Si vous êtes ignorant comme moi, vous découvrirez cette catégorie fourre-tout, LGBT (Qui confond les questions d’identité et d’apparence avec les pratiques sexuelles) soit : Lesbienne, gay, bisexuel, et transgenre.