Chien de la casse de Jean-Baptiste Durand

stoïcien, stoïcienne
adjectif et nom (latin stoïcius) : qui témoigne d’une impassibilité courageuse devant le malheur, la douleur etc


Dog est donc stoïcien, sans aucun doute
Et cela illustre toute l’ambiguïté des personnages de l’histoire où nous emmène Jean-Baptiste Durand.
C’est l’histoire de Dog et Mirales. De Mirales et Dog. Et, un jour, arrive Elsa, l’étincelle, qui, par un concours de circonstances, va être le détonateur, un détonateur silencieux, pour une mise à feu que Mirales, et Dog aussi, avaient depuis longtemps en ligne de mire.
Depuis la sixième, première année de collège, l’année de leur rencontre quand Mirales/Antoine arrive au Pouget chargé de son fardeau qu’il mettra tout ce temps à déposer, en partie seulement mais en grande partie, aux pieds de Dog/Damien et au prix d’un sacrifice.
C’est Mirabar, son chien, qu’il sacrifie sur l’autel de l’âge adulte, Mirabar dont l’oraison funèbre nous émeut autant qu’elle nous fait sourire comme tant d’autres scènes de ce film rédempteur, salvateur, subtil, enthousiasmant.
Comme souvent dans la vie, le plus en souffrance n’est pas celui qu’on croit. Jean-Baptiste Durand nous balade au bras de ses deux héros, nous invite chez eux, creuse leurs pluralités.
On balance entre Dog, taiseux et introverti et Mirales hâbleur et provocateur, cruel, tragique lascar vendeur de shit, épris de littérature et de mots, il cite Montaigne, connait très bien l’œuvre de Hermann Hesse (cette scène aussi nous fige). Mirales aux manières impeccables et bien cachées (la scène d’anniversaire au restaurant !), Mirales, pianiste refoulé, échoué,qui se délecte des notes de sa voisine pianiste interprétées par Evelina Pitti (magnifique personnage !) qui répète la Tempête.
Lui qui comme pour s’étourdir, met du rap à fond dans sa « caisse » vit avec sa mère fragilisée réfugiée dans sa peinture, il la nourrit … Mirales l’écorché vif, qui se la joue voyou, mâle toxique, se débat, fait du bruit, prisonnier en liberté, âme errante et maudite attachée à un lieu qu’il s’applique à faire son tombeau. Un écorché vif et dans ce rôle, Raphaël Quenard, un Dewaere en puissance !
Dog, son pilier, son ange gardien, quasi muet car que dire, que faire sinon attendre stoïquement le dénouement qu’il présage et finit par forcer, est joué par Antony Bajon dont la présence occupe l’espace de façon magistrale. Anthony Bajon (29 ans), repéré dans Les Ogres de Léa Fehner, retrouvé entre autres dans La Prière de Cédric Kahn, Tu mérites un amour de Hafsia Herzi.
Une bombe !

Dans Chien de la casse, son 1er long métrage, Jean-Baptiste Durand nous parle de ce qu’il connaît, une jeunesse péri urbaine, nous invite chez lui dans un village de l’Hérault, hors saison, ses rues vides, ses volets clos, l’ennui qui rode, … où il fait si bon vivre la poésie au quotidien.

Chien de la casse dans la subtilité des relations entre ses personnages fascinants et touchants d’humanité, trouve son tempo, son existence et c’est magnifique !

Marie-No

Pour information : Si vous n’avez pas pu le voir ici à l’alticiné ces dernères semaines, Chien de la casse est toujours programmé et dans de plus en plus de salles (90 la semaine dernière, 152 cette semaine dont Fontainebleau)


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