La campagne de France-Sylvain Desclous

Week-End Jeunes Réalisateurs 26 et 27 mars 2022 
7 films, 7 mondes 

En passant par la Touraine, les Ardennnes …et le politique.

La Campagne de France de Sylvain Desclous, un film plus poétique que politique, burlesque et humaniste.

Il s’agit du deuxième long métrage de Sylvain Desclous, qui a déjà posé plusieurs fois sa caméra dans le village de ses ancêtres et où il a passé ses vacances. Preuilly-sur-Claise, commune rurale de mille habitants, située au sud de la Touraine, loin de l’attraction des villes.

Fin 2019, le réalisateur qui sillonne le village depuis des mois, pense tenir son sujet, avec l’approche des élections municipales.

S’il nous fait vivre la campagne électorale avec ses grands classiques : distribution de tracts, réunions, discussions, il dresse surtout le portrait de son village et de certains habitants.

Jacky ( déjà figure de précédents films de l’auteur ) apparaît au début du film, fracassé par une vie dure et arrosée, mais s’exprimant avec sagesse :  » Je ne vote pas toujours pour celui qui passe, mais je vote toujours bien « !.

Mais l’image et le son priorisent le couple de la troisième liste formé par Mathieu et Guy . Mathieu 38 ans, est revenu vivre au village depuis deux ans dans la maison familiale. C’est un normalien, consultant en intelligence artificielle. Il a des atouts, il défend sa vision et ses idées au travers de sa liste :  » Vivre et agir pour Preuilly » sans étiquette politique même s’il dit en aparté qu’il est  » plus gilet jaune que macroniste ».

Ses parents sont du village-, le père malade ( émouvantes scènes entre lui et son fils à l’EPADH ) est l’ancien photographe du village et sa mère était la directrice d’école. Il nous apparaît sympathique avec ses longs cheveux flottant au gré de sa démarche un peu hésitante, et son manteau un peu large, sa voix douce et sa tranquille détermination.

Il est tout neuf en politique, il y croît, et nous embarque dans le rêve du futur habitant de Preuilly, qui télétravaille, trouve des places à l’école pour ses gamins, se nourrit de produits sains ( voire bio ) en circuit court, tels ces beaux fromages de chèvre à 4 euros , alors qu’à Paris les mêmes valent 12 euros, sans parler des champignons qui tendent leurs pieds aux cueilleurs. Son vrai problème c’est que les gens de Preuilly ne le connaissent pas ( il a quitté le village depuis le CM2 ).

D’où son colistier Guy 74 ans, un natif de Preuilly, grande gueule et plutôt de gauche qui rêve de politique et de mairie, tout étant le mal aimé du village. Le réalisateur le connaît depuis toujours et pense qu’il sera un bon acteur devant la caméra. Personnage attachant, bon vivant, parlant fort, jouant du cor, dansant , roulant dans un coupé Mercedes, bref une figure locale et une vraie figure de cinéma.

Et c’est dans le portrait de ce couple que Sylvain Desclous tient son film. Avec un mélange de relation père/fils, maître et disciple ( toutes ces discussions chez Guy ). Il y a beaucoup de tendresse dans ces visages, ces regards, et dans les larmes versées à la fin par Guy qui en font un beau moment de cinéma.

On peut se souvenir aussi de l’humour, ( lorsque les électeurs pressent un candidat de parler de son programme et que ce dernier ( Patrick ) leur renvoie la question, ce sont aux électeurs de proposer des idées ) ou la scène improbable avec le journaliste,

Mais il n’y a jamais de moquerie ou d’ironie, mais de l’empathie. Le cinéaste parle de son village en le filmant avec amour et lucidité, il restitue un petit morceau d’histoire et un beau regard sur les hommes de ce village.

Françoise

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