Prades, samedi 20 juillet 2018

Jeudi, vu les 4 films de la journée :
Couverture livre La stoffa dei sogni : Affiche Madame Brouette : affiche Moussa Sène Absa

Et « L’Atelier », premier film diffusé dans le cadre de la rencontre avec Laurent Cantet si bien orchestrée par Michel Ciment, (et qu’on avait proposé aux Cramés lors de sa sortie en octobre 2017), on a commencé en beauté. J’ai revu ce film avec beaucoup d’intérêt et de plaisir.
Marina Foïs est, décidément, une actrice bouleversante et ce film illustre bien un aspect du cinéma de Laurent Cantet. Le désir de groupe, la difficulté, la volupté à s’y fondre, le renvoi à l’individualité.

Vendredi, la journée a commencé par le choix entre,  soit « Le Léjà », la Syrie du Sud donc, soit une balade en montagne, dans les Pyrénées donc … Certains ont pu regretter leur choix et pourtant, présenté dans le cadre de la Carte blanche à la Cinémathèque de Toulouse,  ce film syrien, objet rare , mérite d’être vu et à 9h c’est l’idéal car il faut être frais et dispos  pour se laisser transporter dans ce sombre paysage minéral qu’aucun soleil ne semble pouvoir jamais éclairer, où les femmes doivent accepter d’être enterrées vivantes et les esprits d’être figés dans le temps immuable. Un film assez envoûtant, oppressant.

Aujourd’hui, Laurent Cantet matin, midi et soir.
Dans un banquet, on goûte tour à tour chaque met proposé, se délectant de l’un, davantage encore d’un autre, laissant les saveurs s’épanouir,  se méler les épices, se confondre les textures …
Ici, depuis 3 jours, mis à chaque fois en appétit par Laurent Cantet et Michel Ciment, on découvre ou redécouvre  chaque film, on le goûte,  le savourant, s’en régalant pour la première fois,  retrouvant ce plaisir dans une seconde ou troisième fois … Un festin ! Et ça continue demain !

Retour à Ithaque : AfficheL'Atelier : Photo Marina Foïs, Matthieu Luccijeux-de-plage1-laurent-cantetA la frontière entre le Canada et les les États-Unis, Lanrent Cantet adapte un roman de Joyce Carol Oates . © Jérôme de Perlinghi pour Télérama.Entre les murs : Affiche François Bégaudeau Vers le sud : Photo Charlotte RamplingFoxfire, confessions d'un gang de filles : AfficheAffiche du film Les sanguinaires Vers le sud : Photo Karen YoungL'Emploi du temps : Photo Aurélien RecoingL'Atelier : AfficheVers le sud : Affiche Laurent CantetL'Emploi du temps : Photo Aurélien RecoingRetour à Ithaque : Photo promotionnelleL'Emploi du temps : Photo Felix Cantet, Karin Viard, Marie Cantet, Nicolas KalschVers le sud : Photo Charlotte Rampling, Ménothy CésarL'Emploi du temps : Affiche

Un patchwork harmonieux cousus de fils d’or.

Marie-No

Prades, mercredi 18 juillet 2018

21h30.Je suis restée à l’Hostalrich, il me faut un petit break de temps en temps et c’est tombé sur  le dernier film de Marion Hänsel projeté ici : « En amont du fleuve »(scénario original de M.Hänsel)
Mais, plus tôt dans la journée, vu deux autres de ses films
A 9h, « Between the devil and the deep blue sea », V.O. en anglais, adapté de la nouvelle « Li » de Nilos Kawadias.Le récit d’une rencontre entre Nikos, Résultat de recherche d'images pour "between the devil and the deep blue sea film"radio grec sur un vieux cargo, dans l’expectative de son sort, en rade de Hong Kong et une petite chinoise vivant sur un sampan depuis sa naissance. Grâce à Nikos, avec Nikos,  elle mettra les pieds pour la première fois de sa vie sur la terre ferme et sillonnera les rues de  Hong Kong dont son grand-père lui a conté la topographie.
Merveilleux film, une atmosphère prenante des acteurs magnifiques. Tout comme « The Quarry » projeté à 14h, adapté du roman de Damon Galgut avec David Lynch dans le rôle principal. Elle a vraiment une patte à elle Marion Hänsel.
C’est une artiste talentueuse.

Et à 17h00  Guillaume Brac s’est présenté devant nous et alors là, attention les yeux : un charme dingue, la bienveillance incarnée, la classe totale ! Il fait penser à JM.C. Contes de juillet : Affiche
Et son film ensuite « Contes de Juillet » est un enchantement, délicat et déroutant. Programmé par les Cramés en Septembre, ça va être régalant de le revoir ! De le revoir.

Demain, on va regarder les Pyrénées de plus près, aller en Italie, au Sénégal, à la Ciotât.
Et c’est le jour où Laurent Cantet et Michel Ciment arrivent !
Beau programme  !

Marie-No

 

 

 

Prades, mardi 17 juillet 2018

Ce matin, quelques uns sont partis faire l’ascension du Canigou ! Le temps s’y prêtait bien. Je regrette de ne pouvoir les suivre dans ces aventures. Résultat de recherche d'images pour "canigou"Dire que  le souffle me manquerait à 2785 m est un euphémisme !
Hier, au  ciné, la journée était assez moyenne. Marion Hänsel au scénario pour les 3 films. Donc … Heureusement « La tendresse » est incarnée par Marilyn Canto, ça console un peu. L’autre « tendre », c’est Olivier Gourmet et c’est plus difficile. Il a le vent en poupe, tant mieux mais son talent est, pour moi, un brin surévalué. Faut le diriger ce garçon sinon il fait peine à voir, étonné qu’il est d’être là. Le summum étant dans « L’échange des princesses » n’en revenant pas d’être en collant et culottes bouffantes ! Olivier Gourmet, c’est possible mais à la Dardenne, sinon non.
Dust : afficheAujourd’hui, à 9h, on a eu un très bon Hänsel, « Dust », tourné en anglais, d’après le roman « In the heart of the country »de J.M. Coetzee avec Jane Birkin dans le rôle principal, en anglais, parfaite. Une autre personne.
A 17h, « Les noces barbares »,  d’après le roman éponyme de Y. Queffélec, a été assez apprécié du public. Pour ma part, j’ai un souvenir précis de ce livre qui m’avait beaucoup marquée et j’ai trouvé que le coeur du livre, à savoir le désenchantement et le rejet, était survolé et que le film traitait surtout de l’aigreur, de la rancoeur. Je ne voyais pas ça comme ça.
21h. Une avant-première,« Nos batailles » de Guillaume Senez . Très très bien et qui me réconcilie avec Romain Duris, formidable dans le rôle de ce père débordé. De très beaux moments d’ émotion. Le film sort en octobre. Nos batailles : Photo Laetitia Dosch, Romain DurisHâte de le revoir. A Montargis.
Il est déjà minuit et demi ! donc grand temps de dormir un peu, trier, ranger les images d’aujourd’hui et faire de la place pour celles de demain.
Bonjour à tous les Cramés et à bientôt !

Marie-No

 

 

 

Prades, dimanche 15 juillet 2018

Arrivés à Prades en fin de matinée et retrouvé Nanou sur qui le temps n’a pas d’emprise et l’Hostalrich, encore plus beau que l’an passé. Après un déjeuner au « 7ème Art » dehors, bien au frais, le Festival peut démarrer !

17h. Match pour les uns, Woman at War : Affiche Avant-première de « Woman at war » de Benedikt Erlingsson pour
les autres dont moi. On espère vous y emmener, en Islande, à la rentrée, vous verrez comme c’est bien !
21h. « Si le vent soulève les sables » de Marion Hänsel. Je ne la connais pas beaucoup (rétrospectivement, on verra que ce premier film projeté dans le cadre de la « Rencontre avec Marion Hänsel » nous a bluffé. On sera, tout au long de ses 10 films proposés, comme dans des montagnes russes : un coup bien en haut avec les adaptations, un coup bien en bas avec les scénarii originauxAvec « Si le vent soulève les sables », adapté du roman « Chamelle » de Marc Durin-Valois, on est en haut).
Longtemps on repensera à cette belle famille en Afrique qui part vers l’autre bout du Si le vent soulève les sables : affiche Marion Hänseldésert à la recherche de l’eau, de la vie. Longtemps on reverra la pétillante petite Shasha qui avait mis sa plus belle robe pour faire le voyage.
Un très beau film.
Voilà pour aujourd’hui. Demain la journée commence tôt !

Marie-No

« Comme des rois » de Xabi Molla

 

Du 5 au 10 juillet 2018Soirée débat vendredi 6 juillet à 20h30Film français (mai 2018, 1h24) de Xabi Molia avec Kad Merad, Kacey Mottet Klein, Sylvie Testud, Tiphaine Daviot, Clément Clavel et Amir El Kassem 

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Animé par Alain Riou 

critique au « Nouvel Observateur », au « Masque et la plume » et au « Cercle »

 

Distributeur : Haut et Court

Synopsis : Joseph ne parvient pas à joindre les deux bouts. Sa petite entreprise d’escroquerie au porte-à-porte, dans laquelle il a embarqué son fils Micka, est sous pression depuis que le propriétaire de l’appartement où vit toute sa famille a choisi la manière forte pour récupérer les loyers en retard. Joseph a plus que jamais besoin de son fils, mais Micka rêve en secret d’une autre vie. Loin des arnaques, loin de son père…

Quelques mots vite fait, sur « Comme des rois » …
Je me suis rendu compte en faisant un bilan partiel de ces quelques années de « Crâmerie aigüe»   , que tous « mes » films vus  étaient répertoriés « films à revoir» dans les catégories :

  • tout de suite, demain et encore demain
  • tout de suite. Après,  on verra
  • demain, après-demain, un jour peut-être mais toujours au ciné
  • s’il passe à la télé, oui !
  • pourquoi pas s’il passe à la télé
  • déjà revu à la télé et à revoir
  • déjà revu à la télé et à ne pas revoir
  • jamais
  • pitié !

« Comme des rois » est allé se mettre direct dans la catégorie « jamais ».
Je ne me suis pas ennuyée. Je m’ennuie difficilement. Encore que, à la mise en place d’une énième petite arnaque … C’est bon, là … et  ?
Sous un enrobage assez fin, le cœur du film est, pour moi, insipide. Oui, on rit un peu mais quitte à se lancer dans une comédie mêlant le tragique à la cocasserie, à la dérision (finalement c’est pas grave : c’était des Francs), on aurait envie que ça fuse vraiment, que les personnages secondaires soient visibles (réussir à rendre Sylvie Testud invisible, c’est quand même un exploit !)
Ca reste guindé et assez poussif. Très écrit. Pas assez viscéral.
La relation père-fils m’a laissée de marbre et ça m’a frustrée, verdammt nochmal ! Même si Kacey Mottet-Klein s’en sort plutôt bien, c’est la moindre des choses, doué comme il est ! Mais on le sent bridé. On a envie de dire à lui et aux autres « Allez, lâchez-vous les gars, allez-y, c’est vos tripes qu’on veut voir ! »
Pour en avoir, pourtant, sûrement, été la solution, Kad Merad est un problèmes du film.
Kad Merad, excellent, en effet, sur les plateaux télé avec son bagout, son recul, son humour, son charme. Il est malin et il a bien rodé son numéro. « I believe I can fly, I believe I can touch the sky ». « On » l’adore !

Mais au ciné, on voit toujours Kad Merad. C’est, pour moi, le contraire d’un bon acteur. On sait toujours comment il va dire son texte, quelle tête il va faire dans telle situation. Sa mimique, là, mais oui bien sûr ! Tellement attendu … On pourrait fermer les yeux, c’est un comble au ciné !  « Je vais bien, ne t’en fais pas » se classe dans la catégorie « déjà revu à la télé et à ne pas revoir » à cause de ça.
Kad Merad, acteur, est sans surprise, ennuyeux.

De « Comme des rois », je n’ai pas trouvé le fil ni la raison.
C’est très difficile de réussir à emporter la misère sociale dans le registre de la comédie. Il faut être touché par la grâce comme par exemple « Tour de France » de Rachid Djaïdani ou « Divines » de Houda Benyamina

Et la fin de « Comme des rois » est si sombre : « c’est mon fils ! »
… il lui a tellement bien maintenu la tête sous l’eau qu’en fait de suivre des cours d’Acting, c’est devant lui et au « violon » qu’il joue.
No future.

Marie-No

« Daphne » de Peter Mackie Burns

Du 14 au 19 juin 2018
Soirée débat mardi 19 à 20h30
Film britannique (vo, mai 2018, 1h33) de Peter Mackie Burns avec Emily Beecham, Geraldine James et Tom Vaughan-Lawlor

 

Distributeur : Paname Distribution

Présenté par Marie-Noël Vilain

Synopsis : La vie de Daphné est un véritable tourbillon. Aux folles journées dans le restaurant londonien où elle travaille succèdent des nuits enivrées dans des bras inconnus. Elle est spirituelle, aime faire la fête mais sous sa personnalité à l’humour acerbe et misanthrope Daphné n’est pas heureuse. 
Lorsqu’elle assiste à un violent braquage sa carapace commence à se briser…

Selon Nico Mensiga « Un scénario, c’est, comme pour une maison, d’abord un plan, des fondations puis le gros œuvre. Après, pour un scénario, les finitions c’est de faire en sorte que la maison soit hantée »
Daphne est hantée par le temps qui passe et par la mort qu’elle regarde un jour de très près, dans une grocery où elle venait acheter du paracetamol pour soigner une énième gueule de bois, et par la mort de sa mère qu’elle refuse de regarder en face. Elle refuse la vie normale que sa mère déplore « Alors ce serait juste ça la vie ? »
Elle s’y prend comme elle peut, mal. D’alcool en lignes de coke, elle marche « à côté de ses pompes », gracieuse. C’est ça le truc : dans sa déchéance, elle garde la grâce. Bien qu’elle s’abîme dans des rencontres hasardeuses, offre son corps comme une marchandise, elle garde le contrôle, lucide, plus forte qu’il n’y paraît. Comme une sorcière, elle jette de la poudre aux yeux pour flouter son propre reflet et tous les autres dans le miroir. A nous de ne pas renoncer car on la sent vibrer, bouillonner en attendant le déclic qui ne va pas tarder, en attendant la main qui va se tendre vers elle et qu’elle saura être celle qu’elle peut saisir.
Il se trouve que cette main sera ensanglantée, qu’elle commencera par la lâcher avant de la reprendre en pleine conscience devant le sourire de Samir « compagnon de veillée ».
Daphné, nymphe rose : la route vers les mots de joie s’ouvre à toi.

Daphne, c’est un personnage habité, une atmosphère, les parfums d’Elephant & Castle 
Un très joli film

Daphne c’est Emily Beecham
On ne peut pas imaginer une autre actrice dans le rôle de Daphne. Son jeu est extraordinaire. Elle illumine l’écran sans chercher à attirer le regard, sans jamais en faire trop. Elle est exceptionnelle en jeune femme tourbillonnante, misanthrope, insupportable, drôle et intelligente, qui finit peu à peu par apprivoiser son malaise, son mal être.
Et on est, par avance,  éblouis par Daphne débarrassée de ses fardeaux !

Emily Beecham a quelque chose d’exceptionnel. On la reverra forcément très vite.
Grâce à Daphne,  nous avons eu déjà le privilège de faire sa connaissance.

Marie-No

« Milla » de Valérie Massadian

Prix spécial du jury international et de la meilleure réalisatrice au Festival de LocarnoDu 7 au 12 juin 2018Soirée débat mardi 12 juin à 20h30
Film français (avril 2018, 2h08) de Valérie Massadian avec Séverine Jonckeere, Luc Chessel et Ethan Jonckeere

Distributeur : JHR Films

Présenté par Georges Joniaux

Synopsis : Milla 17 ans, et Leo à peine plus, trouvent refuge dans une petite ville au bord de la Manche.
L’amour à vivre, la vie à inventer. La vie à tenir, coûte que coûte et malgré tout. 

 

Milla et Léo, si jeunes, blottis l’un contre l’autre, nimbés de lumière, cette première image, irréelle, donne le ton de ce qu’on ne verra pas : une histoire d’amour romantique.
Valérie Massadian ne nous vole pas notre temps : on sent bien le temps passer.
Et c’est assez gonflé de procéder ainsi, en une successions de longs plans fixes, pour forcer à voir Milla qui fait partie des Invisibles, caste cousine des Intouchables.
Il fallait oser mais dommage c’est quand même un peu long … Le public ne vient pas, voire se taille et, oui, parmi nous, certains, moi par ex, avons, à un moment donné, eu envie de décrocher. Et certainement pas à cause du sujet.

Et comme les images sont belles et le film, une succession de tableaux réalistes très réussis, on reste, captivés finalement.

Au début, je me suis demandé pourquoi la réalisatrice avait, en plus, choisi ces acteurs pour incarner les héros de son film … du suicide !
Et puis (très) tranquillement, je me suis attachée à Milla, j’ai voulu que son petit rire revienne. (pour Léo c’est différent : j’ai vu Candeloro  … très handicapant)

Quand on passe outre et se cramponne, ce qui dérange et ce qui reste, c’est l’impression amère que Valérie Massadian n’a pas intégré le monde de Milla.
Milla, elle l’a observée, détaillée, et même peut-être comprise, l’a aimée et fait aimer, mais après, chacun chez soi.
C’est cette distance qui m’a gênée (ça ne m’étonne pas que les critiques «  parisnobs « aient encensé le film)

N’est pas Agnès Varda ou Sean Baker qui veut, qui se donnent tout entiers à leurs Mona et Halley par Moonee interposée.

Marie-No

Kino + Maurice

Kino Avoblo – Wix.com

https://kinorama77.wixsite.com/avoblo

 

« Faire bien avec rien, faire mieux avec peu… mais le faire maintenant ! »

Le WE dernier, je me suis lancée dans cette belle aventure avec la sensation, au début effrayante, puis, grisante de plonger dans le vide.
La journée « scénario » de jeudi ayant été annulée(pas assez d’inscrits),  on a démarré directement le vendredi avec la session de création.

Et dimanche soir « Maurice » était projeté, avec les 10 autres réalisations, sur grand écran !
« Maurice », mon court métrage ! modeste certes et très court (3mn48) mais qui a le mérite d’exister !
En partant de zéro (jamais tourné, pas de matériel ..) j’y suis arrivée !
J’en suis fière, bien sûr, mais surtout, pendant ces 3 jours, j’ai rencontré des gens formidables,  Aurélie Laffont, Jean-Pierre Becker qui ont fait exister  ce projet et tous les participants (28), certains bien « perchés », tous complètement là.
En 3 jours, j’ai appris beaucoup de choses, je me suis enrichie et bien amusée.

Voici « Maurice »

http://vimeo.com/273658487

Marie-No

« Mektoub my love canto uno » d’Abdellatif Kechiche

Du 17 au 22 mai 2018
Soirée débat mardi 22 mai à 20h
Film français (mars 2018, 2h55) de Abdellatif Kechiche avec Shaïn Boumedine, Ophélie Bau, Salim Kechiouche, Lou Luttiau, Alexia Chardard et Hafsia Herzi

Distributeur : Pathé

Présenté par Marie-Noël Vilain

 

Synopsis : Amin, apprenti scénariste installé à Paris, retourne un été dans sa ville natale, pour retrouver famille et amis d’enfance. Accompagné de son cousin Tony et de sa meilleure amie Ophélie, Amin passe son temps entre le restaurant de spécialités tunisiennes tenu par ses parents, les bars de quartier, et la plage fréquentée par les filles en vacances. Fasciné par les nombreuses figures féminines qui l’entourent, Amin reste en retrait et contemple ces sirènes de l’été, contrairement à son cousin qui se jette dans l’ivresse des corps. Mais quand vient le temps d’aimer, seul le destin – le mektoub – peut décider.

 

«Entre bien dans mes yeux pour que je me souvienne de toi»
(Charles Baudelaire Réflexions 1861)

Des plans serrés, beaucoup de gros plans, un rythme très particulier, aérien.
Abdellatif Kechiche filme comme personne les visages, les corps, l’atmosphère des lieux, l’air du temps, le temps qui passe, l’attente du lendemain qui chante.

Un long trip sensoriel dédié à la célébration de la vie, un film dont on n’a pas envie de sortir : plein de soleil, de lumière, de beauté. La caméra tourne autour des corps qui s’amusent, dansent, se dorent au soleil, s’éclaboussent, plongent dans la mer, des corps dont on ressent la force, la vitalité, l’énergie.
Kechiche magnifie la féminité, le sourire à la vie gravé sur le visage d’Ophélie (sublime Ophélie Bau) auréolé d’amour, sur le corps d’Ophélie, Vénus callipyge, empreint d’un fol appétit de vivre . Auguste Renoir en aurait fait un nu féminin rond, charnu, sensuel, magnifique.
Amin rêve d’en faire des tableaux argentiques.

Le véritable enjeu du scénario, l’amour impossible à dire, s’impose d’emblée.
Amin, ni prédateur, ni rival, scénariste en devenir, photographe patient, laisse faire le destin. On ne force pas l’amour, il le sait, de cette sagesse intuitive qu’on a à vingt ans.
Abdel Kechiche orchestre la circulation des désirs, dans ce groupe très fermé où tout se répète avec d’infimes variations, les silences, les hésitations, la banalité du quotidien, les dialogues identiques, répétitifs d’où finissent toujours par surgir des vérités, blessures et jalousies.

Mektoub my love, canto uno est une ode à la famille, à la fraternité métissée, à la famille multiculturelle, multiraciale, multireligieuse. On est en 1994 : Kechiche filme aussi la fin d’une époque, la fin d’un melting-pot fragile mais souvent heureux et bienveillant. Clément, le premier, a rompu.
«Dieu est la lumière du monde», «Lumière sur lumière, Dieu donne la lumière à qui il veut» Lumière sans condition ? sous condition ?

Parmi tant de séquences splendides, la mise bas d’une brebis précède une autre, interminable à souhait, en boîte de nuit, où l’exhibition des corps sur la piste de danse flirte librement avec la pornographie.
La bergère est en transe mais les pieds bien ancrés dans le sol, en sandales plates. Sur terre.
Amin veille, témoin, confident, objet de désir de toutes les jeunes filles sauf de celle qu’il aime, étranger aux jeux de séduction auxquels il assiste, observateur moraliste en quête de sublimation.
Il pose son beau regard noir sur les plages, dans les bars, les boîtes de nuit, à la ferme pour capter un agnelage dans une lumière devenue clair-obscur silencieux sur le temps arrete.
Un hymne à la vie, Exultate Jubilate !

Comment on dit je t’aime en arabe ? Ophélie et Charlotte connaissent le même « je t’aime », celui de Tony. L’une reste, l’autre part.

Amin et Charlotte se retrouvent et s’éloignent ensemble sur la plage de Sète dans la lumière du soleil couchant.
Le film se termine sur cette réplique d’Amin (sublime Shain Boumedine), illustration de ce premier volet du triptyque annoncé « Mektoub is Mektoub » :
« j’ai tout mon temps »

Mektoub, my love, canto uno est une merveille

Marie-No