Un de ces jours sur nos écrans, Douce France de Geoffrey Couanon

Geoffrey Couanon- Réalisateur, documentariste

Douce France, Geoffrey Couanon :

Ce documentaire présente un espace, autrefois champs fertiles, il y a longtemps des tulipes, puis des patates, du blé, appelé Triangle de Gonesse. Tout autour des zones urbanisées, des logements populaires, HLM pour l’essentiel, impossible de les situer tous, ils se ressemblent, nous sommes non loin de Roissy, d’Aulnay, de Sarcelle, ou de Bonneuil. Demeurent 300 hectares de champs et bois déclarés ZAC. Et au moment du documentaire, il est question d’artificialiser 80 hectares pour le projet Europa-City (1). Le réalisateur filme des jeunes français, pour beaucoup issus de la diversité (comme on dit). Tous aspirent à un avenir meilleur. Or Europa City veut y implanter et regrouper de nombreux commerces, créer une piste de ski. Et avec pour conséquence de créer des centaines d’emplois, de donner du travail.  Un projet séduisant.

Dans quelques lycées, des enseignants présentent objectivement ce projet et ses enjeux  .  Ils  proposent à des jeunes d’enquêter, ils ont déjà leur opinion, elle est le plus souvent favorable. Ils seront amenés à se documenter et à se former un avis éclairé. Ils vont rencontrer successivement le promoteur, des agriculteurs, des membres d’associations « aux cheveux gris » (qui donc qui ont fait leur vie), des commerçants, des riverains. Chemin faisant, ils découvrent ce qui existe déjà, ce qui se prépare, ce qui pourrait exister. Ils découvrent aussi les non-dits du projet.  De rencontres en visites, ils envisagent à fois l’utilité et l’inutilité du projet, la place qu’on leur y donne et l’ avenir qu’on leur dessine. Mais l’avenir d’un jeune est toujours plus grand que la place qu’on veut lui assigner. Particulièrement intéressant.‪ 

1) Depuis ce projet a été abandonné. Laissant place à d’autres lesquels?

PS : Le réalisateur est un spécialiste de l’agro-écologie, son opinion sur ce projet peut facilement se déduire. C’est un documentaire militant. Mais ce film se voit autant comme un plaidoyer contre l’artificialisation de ces terres du Triangle de Gonesse, que comme une enquête sur les jeunes dans les cités, leurs espérances, leurs devenirs.

Le site A voir à Lire fait un bon dossier sur ce film : « On ne peut pas accuser Geoffrey Couanon de forcer la mise en scène au nom de son propre combat politique. Si les adolescents cultivent peu à peu leur rapport à la nature, au monde, à l’argent, s’ils voient dans cette enquête l’opportunité de se questionner sur le sens qu’ils veulent donner à leur vie, ils n’en demeurent pas moins des jeunes ordinaires, avec l’ambivalence qui peut les caractériser à cet âge, le ricanement facile et le franc-parler ». 

Le site Publik Art produit lui aussi un beau travail critique : « Le résultat est une histoire de réveil politique collectif questionnant sur nos modes de consommation et de production, notre rapport au travail, à l’agriculture, à l’engagement pour nous amener à réfléchir aux choix de société qui sont à l’œuvre dans notre Douce France. A 17 ans, ils prennent la parole sur les questions les plus importantes de notre époque. La caméra du réalisateur Geoffrey Couanon se fait toute petite pour laisser la parole aux jeunes et à leurs interlocuteurs. Et c’est un plaisir de voir réfléchir ces jeunes que beaucoup imaginent uniquement intéressés par des sujets superficiels. Ils discutent à bâtons rompus, ils découvrent la complexité de la situation et surtout ils rencontrent d’autres individus, actifs ou non, avec chacun un point de vue à comprendre. Images d’archives et vues panoramiques permettent de situer l’histoire dans un contexte historique plus large pour une réflexion pointue sur les enjeux de notre époque ».

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