« Diamond Island » (2)

 

Soirée-débat mardi 28 à 20h30
Présenté par Françoise Fouillé
Film cambodgien (vo, décembre 2016, 1h43) de Davy Chou avec Sobon Nuon, Cheanick Nov et Madeza Chhem

« Ils quittent un à un le pays
Pour s’en aller gagner leur vie
Loin de la terre où ils sont nés
Depuis longtemps ils en rêvaient
De la ville et de ses secrets
Du formica et du ciné »

La montagne, Jean Ferrat.

Chère Françoise,

Il faut bien l’admettre au plan formel, ce film est beau, toi et des spectateurs ont parfaitement évoqué les qualités de l’image, le travail sur le son, ses usages et ses significations.

Maintenant, il y a le récit, ce que nous raconte le film. C’est l’histoire d’un lieu et des jeunes gens qui travaillent à en faire un autre lieu. Et en même temps, une histoire de leurs vies. C’est à dire de  : comment ils vont se construire eux mêmes.

Le lieu est d’abord une sorte de « non lieu » à la périphérie de  Phnom Penh. Un îlot, un espace de sable et d’herbes sur lesquels il n’y a rien. Le rien c’est l’endroit où nous ne sommes pas, que nous n’avons pas encore marqué de notre (heureuse ?) présence. Ce rien va devenir Diamond Island, c’est à dire un espace kitch conçu par des investisseurs qui font commerce de kitch et s’en gavent jusqu’au paroxysme. (à l’image d’un président milliardaire contemporain, lequel ?).

Pour réaliser ce monument de grossièreté et de bêtise, il faut des travailleurs, pas n’importe lesquels, « ceux qui travaillent pour gagner leur vie, pour eux le travail est une contrainte relevant de la discipline de la faim, rien de plus* »… Pour ceux là,  le travail n’est que « domination, soumission, souffrance et aliénation* ».

Cette histoire ne se déroule pas n’importe où. Il y a tout ce que le film ne dit pas mais auquel nous pensons. Où vivaient ces gens ? Quelle est leur histoire dans la grande histoire cambodgienne, faite de colonisation, de guerre écocidaire, de révolution génocidaire… d’anomie.

 Le décor est campé, demeure ces jeunes, ils sont sympathiques, ils sont l’avenir du pays. Alors quels sont leurs espérances, leurs aspirations, leurs vies, leurs amours, de quelle manière cheminent-ils ? Et c’est l’objet même du film.

Et bien, ils sont comme nous, ce n’est qu’une question de degrés. Les filles veulent de beaux et gentils maris, et les garçons de belles filles et… des mobylettes. Pour la distraction, ils veulent accéder à leur juste part de kitch. Pourtant, il semble que le film contient autre chose, il faudrait le relire d’autres manières.

Et c’est pour ça que je compte sur toi, Françoise pour en faire un autre récit, dans ce même blog, car je suis bien conscient que ce film vaut mieux que mes commentaires. Au plaisir de te lire.

Georges

* *Christophe Dejour, la Croix du 27.02.2017

PS : Nous lirons Françoise, bien sûr, mais on peut déjà se reporter au bel article de Marie-No.

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