« La Haine » Vingt ans après

Le Cinéma permet de penser à autre chose et les chaines Ciné sont bien commodes pour revoir des films et aussi quand les salles sont fermées.
J’ai donc revu à la télé « La Haine » de Mathieu Kassovitz, 22 ans après sa sortie.
Le monde a changé. Moi aussi. Plus Vinz, Hubert, Saïd et les autres qu’à l’époque. Leur appel au secours m’a déchiré les tympans.
A l’époque, cette cité de banlieue, qui paraît, d’ailleurs, aujourd’hui, bien proprette, bien calme, était un autre monde que le spectateur lamda regardait à travers le prisme de la « normalité ». Ce monde là existait, faisait peur, mais on n’y pensait pas souvent. C’était autre part. Pourtant, fatalement, progressivement, inexorablement, naturellement, il fallait bien qu’il déborde !
Quand on regarde le film aujourd’hui, on voit que tous les éléments étaient déjà là.
L’affiche publicitaire géante montrant un paysage idyllique « Le monde est à vous » qui nargue Vinz, Benoit, Saïd chaque jour. Jusqu’au jour où ils décident qu’il allait l’être, à eux, ce monde, qu’ils allaient le forcer à l’être. Et ils corrigent le slogan en « Le monde est à NOUS »
La police et son petit chef qui « forme » une nouvelle recrue aux méthodes du passage à tabac. Pour rien. Pour le fun.
Les échanges entre mecs sur « les soeurs », et avec elles, pas voilées mais pas en jupe, sur leur place et leurs devoirs.
Les armes si faciles à se procurer et qui les hissent au rang de caïd.
La dissonance entre la ville et la banlieue par exemple dans la galerie d’art avec l’expo pseudo Jeff Koons, champagne, petits fours et jeunes demoiselles, deux mondes qui n’ont pas les mêmes codes, ne parlent pas la même langue. Sauf celle de la pub « tu te prends pour la meuf de Wonderbra ? »
Une parenthèse en ce qui concerne la langue. Le film est quasi totalement en verlan et, surtout, la prise de son est, je trouve, très approximative. J’ai vieilli mais je pense qu’à l’époque, je ne devais déjà capter qu’un mot sur deux … La solution on l’a, à la maison. Il suffit de mettre en version malentendant pour avoir les sous-titres ! épatant ! on saisit tout !
Vinz, Saïd, Benoît et les autres sont nés et vivent avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien …
Ils savent qu’ils finiront par tomber et que la chute fera très mal.
Ces trois jeunes adultes issus de la cité sont pourtant, à la base, très différents. Vinz, écorché vif, devenu incontrôlable, Benoît, responsable, raisonnable, Saïd, vif comme l’éclair, dégourdi. Mais leurs parcours, pas le choix, se rejoignent. Forcément. Personne ne les regarde comme des individus. Mis dans le même sac, ils s’endurcissent, s’arment, se protègent et en ressortent avec la haine.
Trop de monde est resté dans « l’escalator », se contentant d’être portés par le système. Etait-il encore temps, il y a vingt ans, de prendre l’escalier ?

Heureusement, l’Art aussi a débordé ! Des artistes ont émergés et émergent de partout dans le domaine de la musique, du spectacle, de la peinture, de la littérature, des arts graphiques, du cinéma …
Les Arts se propagent, apaisent et finiront bien par confédérer.

Le film de Mathieu Kassovitz (28 ans) , en noir et blanc, reste, vingt ans après, fulgurant par son rythme, sa mise en scène, ses acteurs qui, à l’époque, étaient jeunes et peu connus : Vincent Cassel (29 ans), Saïd Tadmaoui (22 ans), Hubert Kaoudé (25 ans), Benoît Magimel (19 ans), Karine Viard (29 ans), Valeria Bruni-Tedeschi (29 ans), Vincent Lindon (36 ans), Zinedine Soualem (38 ans).
Deux, seulement, étaient originaires de « la banlieue ».

Marie-Noël

« A jamais » de Benoit Jacquot Vu(s) à Prades

C’est l’histoire d’un vieux réalisateur, Rey (!) (Mathieu Amalric), séducteur invétéré, qui, accompagné de son actrice Isabelle (Jeanne Balibar), présente son dernier film, un soir , dans une des salles d’un multiplex. Il s’échappe pour monter « cueillir » une jeune sylphide, Laura (Julia Roy) qu’il a repéré, créatrice de spectacles modernes dans une autre salle de ce même lieu. Elle le suit, tout en le précédant, dans les longs couloirs et on se laisserait bien entraîner dans un marivaudage. Las !
Ils filent sur sa moto, il roule très vite, vers sa tanière, son lit. Gagnée ! Laura s’installe chez Rey, dans cette belle maison où habitent déjà tant de ses souvenirs, où vivent ses fantômes grinçants installés au grenier, dans une petite pièce où trône un lit blanc. Laura perçoit ces bruits, ces présences et veut les faire cesser. Elle veut occuper toute la place.
Rey s’invente sa belle histoire d’amour, se fait fort de remonter le temps et épouse la jeune Laura. Isabelle l’a averti : elle est si jeune, elle voudra l’enfant qu’il a toujours refusé d’avoir, elle va lui pourrir la vie. C’est elle Isabelle qui l’aime vraiment, qui a renoncé par amour pour lui à cet enfant, personne ne pourra jamais l’aimer comme elle.
Mais le temps passe, dévastateur, tu vois bien, Isabelle, que tu n’es plus comme sur la grande photo, là, juste derrière toi …
Rey avance avec une autre qui a le pouvoir, croit-il, par sa jeunesse, de l’écarter de son âge. Il lutte contre la vieillesse qui le guette.
Mais son cerveau ne lui permet déjà plus de plonger dans ce bain de jouvence et l’enfer va bientôt commencer, il le sait.
Il a toujours noté des idées pour ses films mais maintenant il prend des notes pour simplement se souvenir, de tout. Il se voit dans un futur proche, redevenir un enfant. Laura le fait manger, s’étonne et le félicite d’avoir lacé ses souliers, part à sa recherche quand un grand blanc dans sa tête le fait sortir et errer dans la nuit …
Il arrive un temps où le tourbillon s’arrête. Il choisit de stopper net le naufrage.
Laura reste seule dans la grande maison et commence son travail de deuil …
Et nous avec …
J’ai trouvé cette sauce pour me rendre ce film prétentieux, tout juste « consommable » … Mais mon Dieu que c’est long ! Et indigeste …
Mathieu Amalric, comme souvent, roule des yeux hallucinés, une partie de son fond de commerce.
Dernière égérie en date de Benoit Jacquot, Julia Roy, scénariste du film ( d’après le roman Body Art de Don DeLillo) sous condition qu’elle en soit aussi l’actrice principale (dixit !), fait penser à Isild Le Besco, la présence charnelle, sensuelle, animale en moins. Donc …
Reste Jeanne Balibar. Délicieuse en Isabelle.

Marie-Noel

« Indivisibili » d’Edoardo de Angelis

Le sujet c’est l’attachement, l’amour viscéral, fusionnel, comment s’affranchir pour pouvoir s’échapper, vivre sa vie, en affronter les dangers, seul (e) tout d’abord. Être un individu, être reconnu comme tel. Avoir le droit,  être autorisé à fonctionner sans les autres.

Dans le film, la situation de base est extrême puisqu’ il s’agit de soeurs siamoises et que, s’apprenant « divisibile », la volonté de Daisy d’être coupée, séparée de corps de sa soeur Viola, est unilatéral.  Ce sujet de l’aliénation a souvent été traité dans dans d’autres cas d’amour  : une mère et son fils, sa fille, un père et sa fille, un frère et une soeur, deux amants, deux amis.

Le sujet c’est aussi l’exploitation de l’homme par l’homme,  ici l’exploitation de siamoises par leur père,  abject, sans vergogne, bourré, de certitudes, aussi. Exploitées par leur mère qui continue à se punir d’avoir enfanté cette enfant double dans deux corps soudés. C’est « la faute » de la génitrice a priori, toujours.

Le sujet c’est aussi la religion et autres sectes avec sa kyrielle de gourous et de disciples, d illuminés, d’aliénés.

C’est une film réaliste, agrémenté de quelques miracles, de clins d’oeil à l’italienne. Une réalité bien sordide dans un décor de désolation avec bétonneuse devant la fenêtre de la chambre. Avec des scènes d’une vulgarité crasse comme celle de la fête de communion de la petite meringue rose boursouflée ou celle de la « party » sur le bateau.

C’est un film qui, d’emblée, place le spectateur dans une situation de voyeurisme insupportable.

Et j’y ai vu un sujet sous-jacent malsain : le fantasme sexuel masculin pour deux très jeunes filles « collées », indivisibles.

Ce n’est pas montré mais, hélas, on le voit quand même. Polluant.

J’aurais peut-être pu faire l’impasse sur ce film mais pas grave, c’est du cinéma.

Ici, à  Prades et partout, vive le cinéma !

Marie-Noël

« De toutes mes forces » de Chad Chenouga (2)

3 prix au Festival de Valenciennes2017
Du 29 juin au 4 juillet
En Présence du réalisateur Chad Chenouga
Film français (mai 2017, 1h38) de Chad Chenouga avec Khaled Alouach, Yolande Moreau et Laurent Xu 
Distributeur : Ad Vitam

Beau film d’un beau réalisateur … Acteur aussi . Son visage nous est connu et sa présence hier soir était comme naturelle, évidente. Il était avec nous, dégageant une bienveillance souriante, tout au bord du rire.
Bel homme lumineux, joyeux.
Son film nous le fait connaître davantage à travers tous ces jeunes gens et jeunes filles qu’il nous présente au naturel, dépourvus d’artifices. On mesure précisément la différence entre les favorisés et les très défavorisés. Sans être amenés à les juger pour autant.
Une belle galerie de portraits.
Nassim alias  « Beau gosse »,  enferme son malheur au plus profond de ses tripes et quand, enfin, il crie en respirant la veste en poils de sa mère défunte (la belle Zined Triki), on soupire, il revient. De loin.
Probable qu’on reverra Khaled Alouach dans d’autres rôles. Il a le physique, la voix et le regard pour jouer tous les rôles de « jeune premier ».  Subjuguant, il le sera en gentil et en méchant. Il a cette présence entourée de cristal, cette classe naturelle, cette distinction. Il m’a fait pensé à Delon époque Rocco.
Nassim appartient naturellement à deux mondes qui inévitablement se télescoperont. Lui est à sa place avec ses copains du lycée parisien où il est scolarisé et à sa place, aussi, à contrecoeur d’abord, avec ses copains du foyer de banlieue où il est placé. Il les rejette puis les adopte. Il est rejeté puis adopté. On sait que ces amitiés là sont fortes. A la vie, à la mort. Nassim est riche des deux milieux. Il a l’intelligence de finir par accepter et comprendre ces jeunes à fleur de peau, enfants bercés, façonnés par le malheur, dévastés, irréparables complètement. Comme lui. Très émouvants, tous. Jose incapable de supporter l’absence de sa mère adorée, Brahim, rieur, à l’esprit vif, négociateur dans l’âme et sa carapace, ses « bouées de sauvetage » contre les dangers de la vie qui l’ont déjà tellement atteint, la belle Mina qui anticipe les abus, les orchestre pour ne plus les subir, Kevin, le gros dur, amadoué  par un « subterfuge », Zawady la bosseuse dont l’échec nous démolit avec elle. Et tous les autres.
Chad Chenouga nous montre exactement leur tendresse et leur besoin d’amour, leurs jeunes cœurs battants sous les plaies profondes.
Madame Cousin, la directrice du foyer (Yolande Moreau, très convaincante) est dépassée mais debout, là avec eux. Ils peuvent compter sur elle. Un trésor. Elle colmate des brèches, fait ce qu’elle peut pour leur faire garder espoir sans mentir jamais sur leurs réalités à chacun. Elle doit appliquer des règles, remplir des dossiers. Son proche départ à la retraite nous inquiète pour eux et aussi pour elle.

Une question que je poserais à Chad Chenouga si le débat avait lieu le lendemain matin (ce qui, pour moi, serait idéal) : est-ce toujours la même photo dans le cadre ? Au fur et à mesure que Nassim avance dans son deuil, on voit le sourire de sa mère se transformer, se défaire et finir par disparaître. Privée de ses excuses pour mieux être pardonnée.

Marie-Noël

« Mister Universo » de Tizza Covi et Rainer Frimmel

 

Primé en 2016 aux festivals de Marrakech et de LocarnoDu 22 au 27 juin 2017Soirée-débat mardi 27 à 20h30
Présenté par Marie-Annick Laperle

Film italo-autrichien (vo, avril 2017, 1h30) de Tizza Covi et Rainer Frimmel avec Tairo Caroli, Wendy Weber et Arthur Robin
Distributeur : Zeugma Films

Synopsis : Il était une fois Tairo, jeune dompteur de fauves dans un petit cirque itinérant des villes et villages de la péninsule italienne. Effondré par la perte de son fer à cheval, son gage de chance et d’amour, Tairo va parcourir l’Italie, à la recherche de celui qui, jadis lui avait offert ce porte bonheur : Arthur Robin, ex Mister Univers, dit « l’homme le plus fort du monde ».

Sur le mode de l’escapade, mêlant personnages réels et fiction,Tizza Covi & Rainer Frimmel continuent avec poésie et humour leur exploration de ces mondes marginaux qui luttent pour perdurer.

Compter : Uno, due, tre, lancer le sel derrière son épaule , à gauche, à droite et le reste à gauche. Graver un nom aimé au couteau sur une bougie blanche et quand elle a fini d’éclairer, jeter la cire dans la rivière pour qu’elle éloigne le malheur de celui dont le nom y était enfermé. Vérifier dans les cartes …
Mais à quoi bon tout ça quand on n’a plus son porte bonheur ?
Tairo est superstitieux, comme tout le monde. Le fer à cheval, qu’il possédait depuis quinze ans et gardait parmi ses objets fétiches, qu’il embrassait avant de faire son numéro avec ses fauves, a disparu. Il éloignait le mauvais œil. Il faut le retrouver. Ou le remplacer.
A partir de là commence un périple, de Rome vers l’Italie du Nord, à la recherche de Mister Universo qui avait plié autrefois le fer précieux. De Tairo, visage poupin et sourire d’enfant, si jeune  -vingt ans ! -se dégage une force impressionnante. La force des enfants élevés dans ces cirques de fortune. Il croit en l’instant présent. Il réagit à l’instant T. L’avenir ? On verra. Après.
On rencontre dans ce film des personnages qu’il faut regarder avec attention. Ils disparaissent sous nos yeux. Tairo , bientôt, n’aura plus de fauves, Wendy, vingt ans dont quinze de contorsion est usée. Son corps est en train de la lâcher. Et elle n’aura pas le loisir d’apprendre un autre métier.
Le directeur du cirque, avec ses lunettes à monture en or, d’une autre époque, s’accroche à ce qui reste et son premier et seul souci finalement est de nourrir sa troupe. Tant bien que mal. Se débrouiller pour, déjà, arriver à demain.
Mais tous aiment leurs vies.
Tairo trouvera Mister Universo, alias Arthur Robin qui, à 87 ans, accompagné de son épouse Lilly,magnifique !, respire le bonheur. Il a toujours un corps d’athlète mais ne plie plus le fer.
Wendy sera plus efficace en allant directement frapper à la porte de la relève : le fils d’Arthur. On est impressionné quand, sous nos yeux, au cinéma, il commence à plier le fer sur son genou !
Mais dans la vraie vie ça n’intéresse plus grand monde, sans doute.

J’ai aimé faire la connaissance des personnages du film que j’ai beaucoup aimés. Ils sont forts, dignes et riches.
Le monde du cirque itinérant est fascinant de désuétude. Bientôt il n’existera plus du tout.
« Mister Universo » fait partie du bouquet final.
Respect.

Je pense que l’avenir de Tairo Caroli est dans le cinéma. Il a une présence, un charisme qui font penser à Tahar Rahim . Il va rester dans la lumière. Sa place.

Marie-Noël

 

« Album de famille » de Mehmet Can Mertoglu

1 prix et 3 nominations à la Semaine Internationale de la Critique 2016
Du 15 au 20 juin 2017
Soirée-débat mardi 20 à 20h30

Présenté par Françoise Fouillé

Film turc (vo, mai 2017, 1h43) de Mehmet Can Mertoğlu avec Şebnem Bozoklu, Murat Kılıç et Müfit Kayacan
Distributeur : Le Pacte

Synopsis : En Turquie, un couple marié, approchant la quarantaine, tente à tout prix de garder secrète l’adoption d’un bébé en constituant un album de photo fictif… .

En sortant de la séance j’aurais dit que le film ne m’avait pas plu, encore que … J’y ai repensé et il m’a quand même pas mal plu. Mais je n’y ai aimé aucun des personnages et puis tous ces plans fixes …

Ça commence super bien avec la partie avant générique de début qui est vachement réussie ! La première image est « blanche ». Une personne, en combinaison intégrale aseptisée, se tient dans un sas, au-delà on voit un large volet électrique baissé, en deçà en arrière, de côté, proviennent des bruits non identifiés. Identifiés quand même très vite car cette personne tient, derrière son dos, un bâton. Le midi même, mon amie D. m’avait révélé que, très jeune, elle avait compris qu’armée d’un simple bâton, elle maîtrisait les vaches et n’en avait, par conséquent, jamais eu peur. C’est des vaches qu’on entend ! On est dans une étable !
Ensuite, il y le taureau, la scène de copulation. Procréer c’est très très simple.

Mais ça peut, aussi, être très très compliqué.

Chez les humains, le recours à l’adoption, dans tous les cas, est un parcours du combattant d’autant plus quand il faut qu’elle reste secrète, toujours, et qu’on a des exigences sur le « produit » : sexe, faciès, couleur de peau … Exit bébé fille, 70 à 85 jours : trop noirs, les cheveux, trop mate, la peau. Pas de lien social avec elle (!).
Se présente le petit Ali qui leur ressemble, croient-ils. Pour le faire passer pour leur enfant biologique, pas question d’adopter un enfant de sangs mêlés, un métisse, un étranger, risquer d’élever un kurde, un syrien !
Ali, bébé garçon tout tendre et rose,  trente à quarante jours de vie. À l’orphelinat, on dit l’âge en jours, comme dans une basse cour . Apparaissent d’ailleurs dans le film beaucoup de volatiles, des poules, des canards, des oies, des pintades … Jusque dans le bureau du directeur de l’orphelinat où surgit d’un coup sur le côté, une grosse oie grise. Le directeur s’agite et la chasse. C’est avec la scène du cambriolage, où Cuneyt chasse l’intrus (le pousse du 11eme étage ?)  la seule scène d’agitation. Sinon c’est toujours deux de tension. Les fonctionnaires (police, impôts) s’endorment même à la première occasion, assis, la tête sur le bureau comme frappés de narcolepsie (ou de poil dans la main fulgurant). Quand ils ne dorment pas, les « chefs » sont préoccupés par des sujets comme les cravates en solde, les champignons, le taux des crédits, ils parlent à leurs subalternes, maîtresse ou subordonnés, au téléphone souvent, comme à des chiens.
Pas un personnage pour rattraper l’autre. A fuir. Tous.

Les deux protagonistes Cüneyt et Bahar sont d’abord déroutants puis franchement antipathiques. Ils ont la quarantaine, sont mariés depuis longtemps se comprennent 5 sur 5 sans besoin de longs discours. Leur vision du monde est restreinte. Ils font partie des nantis, ne sont pas impliqués dans grand chose, travaillent sans passion ni conviction. Ils flottent dans une sorte de sirop poisseux, englués avec leurs concitoyens. Seule ombre au tableau : ils n’ont pas eu d’enfant et ça, ça n’est pas conforme. Le grand frère de Bahar n’est pas content quand il apprend que l’adoption est sue, publique. Sa réaction est  terrrrible !!!
Alors, cet enfant qu’ils avaient mis dans leur décor, auquel ils n’étaient toutefois pas spécialement attachés, auquel ils n’accordaient pas beaucoup d’attention, dont les pleurs ne les réveillaient pas, un comble,  qui faisait partie des meubles … autant le gommer, le faire disparaître. Passer à la suite. Allez, les cascades de Düden, prés d’Antalya, tu te rappelles ? Si on allait se balader par là, tous les 3 ?

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Marie-Noël

« Adieu Mandalay » de Midi Z (2)

Grand Prix au Festival International du Film d’Amiens

Du 7 au 13 juin 2017Soirée-débat mardi 13 à 20h30

Présenté par Laurence Guyon

Film birman (vo, mai 2017, 1h43) de Midi Z avec Kai Ko, Wu Ke-Xi, Wang Shin-Hong
Distributeur : Les Acacias

 

De Lashio, pour rejoindre la Thailande, clandestinement, il faut payer. Cher. Plus ou moins selon le « confort souhaité » … Dans le coffre du pick-up c’est 8000, le moins cher, un enfer (les passeurs ont prévu les cachets pour éviter de nettoyer leur outil de travail à l’arrivée !).
Liangqing paie 8000 kyats. Guo échange avec elle sa place à 10000. Il s’auto-promeut chevalier servant, ange gardien, il en fait sa muse, son idéal. Il fait une véritable fixation sur elle et ne la lâchera plus.
Ce n’est pas une rencontre, c’est un kidnapping. Il y a maldonne. Ces deux-là n’auraient pas dû se rencontrer. Alors Liangqing aurait tracé sa route, contre vents et marées, solide, déterminée. Mais son chemin a croisé celui de Guo, personnage sans envergure, qui prend possession de sa destinée, l’empêche de vivre sa vie. La scène de la chambre, filmée du dessus, nous éclaire sur leur relation. Ils sont allongés, séparément, elle en haut, lui en bas. Elle laisse pendre sa main. Il ne s’en saisit pas. Il l’approche, la frôle, n’ose pas. Ose peut-être. La scène s’arrête là et on se demande si, pour finir, ils se sont (ré)unis. Non.
Il continue à la dévisager, elle le voit à peine, à peine une fois repose-t-elle sa tête sur son épaule sur le scooter, découragée de s’être faite arnaquée par les faussaires.
Les scènes d’usine sont magnifiques. On voit Liangqing tendre les fils, les séparer, les réunir en boisseaux. On dirait une déesse, gracieuse joueuse de harpe et on sait la musique que ces gestes lui jouent. Musique d’affranchissement, possibilité de liberté.
Et Guo, inlassablement, à contre courant, la débarrasse de tous les petits fils restés collés à sa peau, visibles de lui seul. Il l’immacule.
Quand apprenant qu’il l’a trahie en lui cachant l’intervention de Wiangang pour lui faire obtenir des papiers, Liangqing décide de partir et Guo perd la raison cf les scènes magnifiques de sueur et de feu, scènes de tragédie. Liangqing a décidé de gagner vite les 300000 baht nécessaires à l’obtention de ses papiers. La scène de prostitution est stupéfiante. On est horrifié par la laideur et la brutalité de ce gros client éructant, de cet énorme varan battant de la queue dans le cou de Liangqing.
Guo, fou de douleur viendra la saigner dans son sommeil et, puisqu’il était dit que leurs fluides ne se mêleraient pas, s’éloignera un peu pour faire jaillir le bouillonnement de son propre sang, éclaboussant Bouddha dans son cadre.
Mais c’est vrai, au fait : et Bouddha dans tout ça ?

Marie-Noël

NB : Ou bien, Guo symbolise la conscience de Liangqing, son moi, son éducation, son chemin tracé, qui l’encombrent et dont elle sera débarrassée, dans un bain de sang, après être devenue une autre. Alors elle pourra tracer sa route, contre vents et marées etc … Armée de ses papiers,  réfléchie et courageuse elle fuira la médiocrité, et sa vie se présentera sous de meilleures auspices, à Taïwan ou ailleurs, plus jamais Liangqing et sans retour à Lashio.

Le titre français « Adieu Mandalay » n’a rien à voir avec le film.
Le titre anglais « The road to Mandalay » fait référence au poème de Kipling « Mandalay » (189o, Kipling a 24 ans), évocateur d’orient romantique et lumineux, mirage d’alors aujourd’hui plus que disparu, et qu’on aime sans le connaître.
Pour rester dans le thème »rien à voir avec le film « , Sinatra l’a chanté. Très bien.

https://youtu.be/7T0fArVS7P4

« Félicité » d’Alain Gomis

Ours d’argent à la Berlinale 2017Du 1er au 6 juin 2017Soirée-débat mardi 6 à 20h30
Présenté par Jean-Pierre RobertFilm Sénégalais (mars 2017, 1h38) de Alain Gomis
Avec Véronique Beya Mputu, Papi Mpaka et Gaetan Claudia
Distributeur : Jour2fête

Synopsis : Félicité, libre et fière, est chanteuse le soir dans un bar de Kinshasa. Sa vie bascule quand son fils de 14 ans est victime d’un accident de moto. Pour le sauver, elle se lance dans une course effrénée à travers les rues d’une Kinshasa électrique, un monde de musique et de rêves. Ses chemins croisent ceux de Tabu.

Félicité, d’abord, ne s’appelait pas Félicité. Enfant, elle est morte et on l’a placée dans un cercueil avant qu’elle ne revienne « finalement » à la vie et on l’a rebaptisée Félicité. C’est pour moi, ce double traumatisme de mort et de changement d’identité qu’elle revit encore et encore dans ses errances nocturnes, revêtue d’une robe blanche comme un linceul, au milieu des arbres, qui la mènent au fleuve où elle se laisse couler et d’où elle resurgît toujours. Ce monde parallèle est son refuge où elle fait entrer, selon besoin, les trop plein de sa vie, son fils Samo accidenté, le regard fixe mais debout, Tabu, son amoureux, colosse aux pieds d’argile, entre autres.

Félicité est une femme forte qui lutte et qui travaille, affranchie des hommes. Sa voix envoûtante les tient à sa merci. Mais c’est une course de fond. « Cent fois sur le métier remettre votre ouvrage ».
L’APPEL, redouté de toutes, la déracine et malgré sa ténacité, son énergie, les bassesses qu’elle s’inflige pour rassembler l’argent nécessaire à l’opération, malgré l’entraide et le soutien de ses voisins, tous plus pauvres les uns que les autres … scènes ubuesques, elle ne parviendra pas à sauver la jambe de son fils.
Le sentiment de culpabilité, d’échec, alors, ne la quittera plus. Elle ne peut plus chanter, elle sombre. La main tendue de Tabu est tentante. Il est émouvant Tabu, corpulent, imposant, quand il lui dit ses beaux poèmes, si délicats.
Et il est rassurant même s’il n’arrivera sans doute jamais à percer le mystère du frigo en panne. Et sans frigo à Kinshasa … Qu’est ce qu’on mange ? Les préparations culinaires ici ne sont pas très alléchantes …
Tabu gagne son coeur quand il fait bouger, sourire, revivre son fils.
Après avoir dégager ses conquêtes, Félicité va, peut-être, enfin, se laisser approcher, se mettre nue devant lui, se laisser apprivoiser, poser ses fardeaux. Dans cet ordre-là, sans doute.
Et après … Elle retrouvera sa voix, l’envie de chanter. La musique est salvatrice. Et elle pourra revivre. Samo amputé. Autrement.
Je suis restée à l’entrée de Kinshasa, à l’entrée du bar, à l’entrée de l’hôpital, au-dessus du marché. Je ne suis pas entrée de plain pied dans Kinshasa. Une première approche de cette ville qui m’a parue « épouvantable ». Misère, corruption, machisme, brutalité. La scène du marché est, par exemple, épouvantable. Un couple est massacré et personne ne bouge. Tabu regarde, On attend qu’il s’interpose. Il ne bouge pas. On a le sentiment que l’individu doit faire abstraction de la foule pour pouvoir avancer . Comme dans la scène en plan large (mais oui !) où la foule se fige et où seul Tabu avance.
Epouvantable, le médecin qui veut ses sous avant d’opérer. Et comment on fait si on ne peut même pas payer les médicaments ? Rien. On hurle de douleur. C’est comme ça à Kinshasa.

Film particulier, étourdissant. Intéressant.

J’ai aimé le personnage de Félicité, sa force travaillée, sa maîtrise d’elle-même, sa dignité, son beau visage, première et dernière image du film.
Et Tabu, ex petit Bandit, vrai gentil dans un grand corps puissant.

Marie-Noël

«Après la tempête» (海よりもまだ深く) de Hirokazu Kore-eda

nominations au Festival de Cannes 2016Du 25 au 30 mai 2017Soirée-débat mardi 30 à 20h30


Présenté par Marie-Annick Laperle

Film japonais (vo, avril 2017, 1h58) de Hirokazu Kore-eda avec Hiroshi Abe, Yoko Maki et Yoshizawa Taiyo
Distributeur : Le Pacte

Synopsis : Malgré un début de carrière d’écrivain prometteur, Ryota accumule les désillusions. Divorcé de Kyoko, il gaspille le peu d’argent que lui rapporte son travail de détective privé en jouant aux courses, jusqu’à ne plus pouvoir payer la pension alimentaire de son fils de 11 ans, Shingo. A présent, Ryota tente de regagner la confiance des siens et de se faire une place dans la vie de son fils. Cela semble bien mal parti jusqu’au jour où un typhon contraint toute la famille à passer une nuit ensemble…

Qu’est ce que tu voulais faire de ta vie ? Est-elle telle que tu l’imaginais, enfant, celle dont tu avais rêvé ?

La réponse est …

Pour Ryôta, le père, personnage principal, à l’instant, la réponse est, de toute évidence, « non ». Mais l’amour à jamais intact de sa mère lui permettra d’ajouter un « pas encore », salvateur, peut-être. Doué pour la littérature, admirateur de Jean-Henri Fabre (1823-1915) célèbre humaniste, écrivain et poète français très connu au Japon (pour moi un inconnu, ou un oublié, jusqu’à mardi dernier …) dont il parle à son fils Shingo. Ryôta, piètre calligraphe, faiblesse sans cesse soulignée par sa mère, transmise par elle, a écrit un premier roman «La table déserte» pour lequel il a reçu un prix. Un bon début. Il est célèbre mais, semble-t-il, juste dans le quartier où il a grandi et qui est resté le quartier de ses parents. Un petit prix qui lui est monté à la tête alors qu’il y a des « table déserte », des invendus plein ses étagères et que son père, joueur invétéré, a distribué, gratuitement, aux habitants du quartier, pariant sur la renommée future de son fils et leur disant de garder précieusement leur exemplaire qui, un jour, vaudra très cher ! Mais quand ?
Pour un écrivain, le deuxième livre est le plus difficile à écrire mais Ryôta n’a pas de page blanche. Sa vie lui échappe. Il a pris ce boulot de détective, à temps partiel, soit disant pour trouver de la matière pour son second livre. Mais il n’utilise pas son temps libre devant son ordinateur (plus besoin de l’encrier et des pinceaux pour écrire, la calligraphie ne sert plus qu’à l’envoi de faire-parts), ordinateur sûrement mis au clou, d’ailleurs, avec tout le reste. Ryôta est occupé à jouer. Il s’est englué dans ses combines, ses arnaques pour toujours pouvoir parier sur tout et n’importe quoi. Son père jouait, il joue et son fils jouera. La vie de Ryôta est en désordre, à l’image de l’endroit où il vit.
La prochaine étape est l’expulsion, la rue. Sa mère.

Sa mère, Yoshiko qui est là. Dans cet HLM où l’addiction au jeu de son mari les a fait migrer il y a tant d’années, provisoirement, pour toujours. Sa mort l’a libérée, elle revit et de lui, elle dit à son fils s’être débarrassée de tout. On verra qu’elle en a gardé pourtant l’habit, la chemise dont elle revêtira leur fils, une nuit de tempête. Elle porte en elle le deuil de ce mari défaillant, qui vient la visiter, l’accompagne la nuit déguisé en papillon. Leurs deux enfants, adultes, attardés, à charge, la pillent, jouent avec sa corde sensible pour lui extirper, qui des leçons de violon, qui des cours de patinage « arctistique ». Elle voudrait vivre un peu enfin pour elle-même et s’octroie pour commencer le plaisir d’assister avec six autres habitantes de la cité aux « cours de Beethoven » prodigués par un voisin retraité, lui aussi et qui héberge « sa fille », son fardeau. Provisoirement, peut-être.
Yoshiko cuisine « à l’ancienne », le secret semble être de laisser refroidir, infuser pour que les arômes se libèrent, se mélangent, se diffusent. Une recette aussi pour faire (re)fleurir le talent. Et trouver le bonheur. Il s’agit de bien choisir les ingrédients, de renoncer à certains pour goûter les autres, de mêler les bonnes saveurs, les faire s’accorder. Yoshiko donne cette recette à son fils puis, émue, ironise : tu pourras mettre ça dans ton prochain roman. J’ai pensé à la scène, plus acide, dans « Juste la fin du monde »de Xavier Dolan entre la mère Martine (Nathalie Baye) et son fils Louis (Gaspard Ulliel). Pareil. Ailleurs.

Grâce au typhon, la famille se retrouve dans l’appartement de Yoshiko qui est petit mais l’espace est resté le même alors qu’eux ont grandi. Ils ont le réflexe, à table, de se pencher en avant pour qu’on puisse ouvrir le frigo, dorment dans le salon sur des futons alignés côte à côte provisoirement étalés. Ils partagent naturellement le rituel du bain. Dans la pièce dédiée faite pour les ruissellement et les débordements, on se lave d’abord, on se douche et une fois bien propre, on se plonge chacun son tour dans la même eau du bain familial.

Transmission volontaire et involontaire, modèle à suivre, amour perdu, préoccupations d’adulte infligées aux enfants, difficulté à trouver son chemin, embûches, mensonges, précarité …
Autant de sujets délicats traités en cascade, de façon subtilement réaliste dans ce très beau film mettant en scène des personnages à la fois résistants au « chaud et froid » et fragiles.
Comme de la porcelaine. Japonaise, par exemple.

Marie-Noël

 

« Le gouffre aux chimères » de Billy Wilder

 

Soirée-débat dimanche 28 à 20h30Présenté par Henri Fabre
Film américain (vo, avril 1952, 1h51) de Billy Wilder avec Kirk Douglas, Jan Sterling et Porter Hall

synopsis : Charles Tatum, journaliste sans scrupules, va exploiter un scoop. Au Nouveau- Mexique, Léo Minosa, un Indien, est coincé au fond d’une galerie effondrée. S’arrangeant pour être le seul journaliste sur le coup, il va persuader le shérif de choisir la formule de sauvetage la plus lente. Tatum va devenir l’amant de la femme de la victime et poussera l’hypocrisie jusqu’à devenir l’ami de Léo.

 

Oublions le Gouffre et les Chimères et autre Big Carnival.
« Ace in the hole »(Un atout dans la manche), le premier titre choisi par Billy Wilder, était vraiment le bon car il s’agit bien ici d’un jeu. Sordide.
Chuck Tatum distribue les cartes, 1 atout pour lui, les autres pour ses partenaires Lorraine Minosa et Guz Kretzer, le shérif, qui savent jouer, connaissent les règles, et 1 aussi pour le jeune Herbie Cook qui veut entrer dans la partie et comprend vite.
Les autres devront jouer avec les cartes qui restent et qui ne sont pas gagnantes, a priori.
Dans cette partie, Chuck Tatum joue son va-tout.
Il a 35 ans (à peu près), ses démons l’ont fait virer de son poste de journaliste à New York et il a dégringolé, il a roulé, atterrissant à Albuquerque, dans le journal local dirigé par Mr Boot, modèle de patron juste, de journaliste intègre.
Chuck est incongru dans ce petit bureau avec Miss Deverich et ses cols en dentelle.
Un pauvre type coincé dans une galerie de la montagne des Sept Vautours va lui « tendre la main ». Mais pourquoi est-il coincé là, ce type ? Parce qu’il pille les sépultures des indiens pour en vendre les trésors. Pas joli, joli … Il jouait cet atout et a perdu.
Les indiens, en tribu, sont plantés, groupés, les bras ballants, devant la montagne, savourant, mais alors très intérieurement, la colère des Esprits qui protègent leurs ancêtres et ont enfin châtié un des profanateurs. Ils aideront un peu, beaucoup, passionnément, les Esprits dans d’autres films.
Lorraine, la femme de Leo joue son deuxième atout. Le premier elle l’a joué en suivant ce latino péquenot qui l’a sortie du saloon où elle exerçait ses talents. Et a perdu car le commerce mirobolant qu’il lui avait fait miroiter n’est qu’un bar minable, servant aussi d’habitation, à Albuquerque à proximité de la montagne des Sept Vautours, où elle dort depuis cinq ans. Avec le couple, vivent Mama et Papa, les parents de Leo. On soupçonne Papa de se joindre, en temps normal, à son fils, pour piller. Mama est anéantie, à genoux devant sont autel domestique, récitant ses litanies.
Chuck plait à Lorraine et on imagine qu’il n’a pas pour habitude de négliger une « belle plante ». Le côté sexuel de leur relation est illustré par les détails donnés par Lorraine sur sa pilosité.  Elle est châtain sur sa photo de mariage. Avant, au saloon, elle était rousse. Elle s’est décoloré les cheveux et est devenue platine à Albuquerque. Et à Chuck, elle parle de son châtain d’origine …
C’est l’arrière de sa tête platine qu’il saisit avec brutalité pour l’attirer à lui et la « posséder ». Billy Wilder ne montre rien, la censure n’a pas de grain à moudre.
Lorraine pilotée par Chuck va saisir son deuxième atout pour faire de l’argent et s’en sortir. Et, elle, va gagner.
Arrivé au point de non retour, constatant qu’il a perdu, Chuck, qui ne prend pas d’anti-coagulant, va super bien « gérer » sa sortie.
Il embarque le curé, toujours prêt à partir donner les saints sacrements et l’absolution à des kilomètres à la ronde et il a encore le temps de raccompagner le jeune Herbie, pour qu’il reprenne sa place, dans le bureau du journal local, grâce au bon Mr Boot.
Chuck Tatum s’est racheté et peut (enfin) s’écrouler.

Chez Billy Wilder, je m’accommode très mal des dialogues ininterrompus et du rythme « endiablé » (qui n’empêche pas les longueurs). C’est trop pour moi. Stop ! Besoin d’un peu de silence, un peu de gros plans, sans paroles, ni musique, ici sur les visages et la Montagne des Sept Vautours ».
Plus je vieillis, moins j’aime regarder ou revoir des vieux films.

Mais plus j’aime aller au cinéma.

Marie-Noel