Bertrand Tavernier : Le cinéma et rien d’autre

Je crois me souvenir de Philippe Noiret interrogé par un journaliste à un JT pour présenter le dernier film dans lequel il jouait, L’horloger de Saint Paul, réalisé par Bertrand Tavernier. Je ne connaissais pas ce réalisateur mais j’aimais beaucoup Noiret. Je suis allée voir le film pour l’acteur : j’ai adoré, j’ai été fascinée par la présence de Noiret, mais j’ai été frappée par la façon dont le réalisateur filmait la ville, sa ville… C’était en 1974, j’avais 20 ans et je découvrais un réalisateur qui s’appelait Bertrand Tavernier. Puis j’ai vu les films suivants, presque tous, certains plus marquants que d’autres, plus engagés aussi. J’allais au cinéma non plus pour voir Noiret, qui a tourné 6 films avec lui, mais pour voir un film DE Bertrand Tavernier.

Je me souviens de ses conférences, de ses analyses de films, décortiquées comme peu savent le faire, des conférences lumineuses qui vous font comprendre ce qu’est le langage cinématographique comme un professeur de Lettres qui vous fait entrer au plus profond d’un texte et vous le fait aimer, moment magique où tout s’éclaire et vous semble limpide…

Plus tard, je l’ai écouté présenter son ouvrage sur le cinéma américain, toujours aussi passionnant : on se sent humble à écouter des gens comme cela, on apprend, encore et encore, on va même se croire un peu plus intelligent. On resterait des heures à écouter…

Réalisateur inclassable puisqu’il a exploré quasiment tous les genres et a traité de sujets très différents ; créant des liens solides avec ses acteurs, passionné et passionnant, conteur hors pair, il avait cette voix chaude et envoûtante, celle d’un passionné, une voix qui savait aussi s’élever pour mieux s’indigner, se mettre en colère, se révolter, dénoncer: citons ici quelques œuvres, La vie et rien d’autre, Capitaine Conan, Ça commence aujourd’huiDe l’autre côté du périph en collaboration avec Niels, son fils, des films, un documentaire qui témoignent de son engagement.

Est-ce sa passion du cinéma américain qui le pousse à faire Round Midnight , 1986 (Autour de minuit) sur la vie de deux jazzmen, Lester Young et Bud Powell et plus tard, en 2009, à adapter le roman de James Lee Burke Dans la brume électrique ? Peut-être…

Je ne lis que très peu de bandes dessinées mais je suis allée voir le film DE Bertrand Tavernier Quai d’Orsay découvrant qu’il s’agissait d’une BD de Christophe Blain et Abel Lanzac : quel délice ! Un tout autre genre !

Films en costumes d’époque, films policiers, films qui s’inscrivent dans une réalité sociale et économique contemporaine, Bertrand Tavernier s’est essayé à tout. Les Cramés ne s’y sont pas trompés lorsqu’ils l’ont choisi pour une de leurs rétrospectives.

Si Philippe Noiret a « aidé » le jeune réalisateur Bertrand Tavernier, ce dernier a, quant à lui, « révélé » certains acteurs sous un angle inattendu : deux, entre autres, m’ont particulièrement frappée : Joseph Bouvier (Michel Galabru) Le juge et l’assassin, Marie, marquise de Mézières (Mélanie Thierry), La princesse de Montpensier.

Des films à voir et revoir, des interviews à réécouter, des ouvrages à lire, Bertrand Tavernier, ce ‘grand’ du cinéma, ce cinéphile d’une culture époustouflante, cinéaste connu et reconnu nous laisse une œuvre éclectique et abondante, Bertrand Tavernier, nous avons perdu l’autre ‘Lumière’ du cinéma, ce 7ème Art auquel il aura consacré sa vie : du grand art Monsieur Tavernier!

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